Le phénomène d’emprise, relatif aux situations de violences conjugales et intrafamilial et encore mal compris de notre société.
En effet, l’emprise est un engrenage central des violences faites aux femmes.
L’emprise c’est comme un iceberg : on n’en voit que la surface émergée, les violences physiques, les homicides. Mais si la personne sous emprise ne réagit plus aux coups, c’est parce qu’en amont, ces coups ont été préparés par de la violence psychologique. La victime a fini par s’habituer à être dénigrée, disqualifiée…
L’emprise est un phénomène de violences psychologiques qui s’installent dans le temps. Ca commence par une phase de séduction narcissique, une alternance de violences et de marques d’affection. Un brouillage s’opère. Des choses agréables sont dites, suivies par des choses déplaisantes qui vont être justifiées par des petites phrases comme « oh ça va, tu n’as pas le sens de l’humour ! » La personne sous emprise qui reçoit ces dénigrements va les intégrer, se dire « c’est vrai ».
Sur le registre cognitif, ces messages contradictoires ont un effet paralysant sur le cerveau. Ce brouillage entraîne la perte de l’esprit critique. Les personnes sous emprise ne savent plus à quel moment réagir. Vulnérables, ça les amène à se laisser soumettre.
Lorsque ça se passe mal, la personne sous emprise se raccroche à l’idée que quelquefois son agresseur a été gentil.
L’emprise, c’est comme un lavage de cerveau. A un brouillage, renforcé par un climat d’intimidations (portes qu’on claque, couteau avec lequel on joue) et de menaces (celles d’enlever les enfants, d’arrêter de verser de l’argent. voire de chantage au suicide). L’emprise se traduit aussi par un contrôle, renforcé à notre époque par les nouvelles technologies.
Autre mécanisme qui renforce l’emprise : l’isolement. Les personnes sous emprise sont isolées de leur famille, leurs amis, leur vie sociale, leur travail. Ça se fait progressivement, au gré de petites remarques sur son entourage par exemple, « Oh tu sais, tu vaux mieux que ta famille ». Ainsi, la victime perd ses alliés éventuels pour quand elle voudra partir.
La soumission est aussi une stratégie d’adaptation. En choisissant l’opposition frontale, elle pourrais augmenter la violence.
Ça prend du temps, et les personnes sous emprise ont besoin de soutien. Ce qui décourage les intervenants, c’est lorsque elles se décident à partir puis reviennent auprès de leur compagnon. Mais c’est normal. C’est le résultat de l’emprise, elles ont été tellement conditionnées par ce procédé qu’il faut qu’elles testent leur capacité d’autonomie.
De nos jours encore, malgré le fait qu’on met plus en lumière la problématique des violences conjugales, le phénomène d’emprise, subtil, n’est pas défini dans le code pénal. L’institution judiciaire a parfois du mal à s’emparer de ce concept faisant appel à des notions psychologiques, voire psychiatriques.
Hors, cette notion d’emprise est fondamentale pour comprendre pourquoi les femmes victimes de violences conjugales restent auprès de leurs conjoints violents ou reviennent en moyenne sept fois au domicile quand elles décident de parler ou de porter plainte. Mais elle est encore connue du grand public et pas reconnue en tant que tel dans la loi.
Conférence : L’emprise, la comprendre pour s’en libérer – Bing video
Il est important, d’appréhender, de s’informer, de se former à cette notion afin de pouvoir entendre, écouter, orienter et apporter la meilleure prise en charge possible aux victimes de violences conjugales.