L’expression « violences conjugales » désigne l’ensemble des violences (physiques, psychologiques et économiques) commises au sein du couple par le conjoint, le ou la partenaire de Pacs ou d’union libre. Les violences conjugales sont punies par la loi et vous devez porter plainte si vous en êtes victime. La violence conjugale peut être de la violence physique ou sexuelle, de la violence psychologique ou de la violence économique. La violence physique se caractérise par l’emploi de gestes violents dans le but de vous blesser. La violence sexuelle est un geste à caractère sexuel commis sans votre consentement, sous la menace ou le chantage. Voici quelques exemples de violence physique et/ou sexuelle :
La violence psychologique est un comportement ou un ensemble d’actes qui visent à vous rabaisser ou à vous dénigrer. Voici quelques exemples de violence psychologique :
La violence économique est un comportement qui vise à vous priver d’autonomie financière, et à vous placer sous le contrôle de votre conjoint, ou de votre partenaire de Pacs ou d’union libre. Voici quelques exemples de violence économique :
Vous êtes victime de violence conjugale si vous subissez un ou plusieurs des faits cités ci-dessus de la part de votre conjoint, ou de la part de votre partenaire de Pacs ou d’union libre. |
Catégorie : Pour comprendre
Focus: Le contrôle coercitif
Le contrôle coercitif : un concept essentiel dans les violences conjugales
Aujourd’hui, des États s’orientent vers la criminalisation du contrôle coercitif dans leur réponse aux violences conjugales.
Malgré une prise de conscience grandissante de la notion du contrôle coercitif, elle est parfois confondue avec l’emprise ou la violence psychologique. Cependant, le contrôle coercitif est distinct de ces deux concepts.
Il est essentiel de comprendre ce type de comportement afin d’élaborer des politiques et des réponses adaptées.
Définition communément admise du contrôle coercitif
Le contrôle coercitif est défini comme un acte délibéré ou un schéma comportemental de contrôle, de contrainte ou de menace utilisé par un individu contre une personne, un/e partenaire intime ou un/e ex-partenaire, dans le but de la rendre dépendante, subordonnée et/ou de la priver de sa liberté d’action.
Les agresseurs intimident, humilient, surveillent, manipulent et/ou isolent afin d’exercer leur pouvoir et leur contrôle. Les tactiques, sur un laps de temps, peuvent être psychologiques, physiques, sexuelles, émotionnelles, administratives et/ou économiques.
L’auteur de contrôle coercitif isole souvent sa victime de toute forme de soutien, exploite ses ressources, l’empêche d’accéder à de nouvelles ressources, réglemente la vie quotidienne de la victime et la prive des moyens nécessaires pour accéder à l’indépendance, résister ou s’enfuir.
Le contrôle coercitif se distingue des agressions isolées.
Définitions, conceptualisations et termes alternatifs
Le terme « contrôle coercitif » est souvent utilisé de manière interchangeable avec d’autres termes, tels que « violence psychologique » , « violence émotionnelle », et « terrorisme patriarcal ou intime », bien qu’il y ait des différences de signification.(1)
Les termes violence « psychologique » et « émotionnelle » peuvent décrire certains aspects du contrôle coercitif, cependant ils n’intègrent pas d’autres éléments de ce dernier tels que le stalking (harcèlement par la traque), les violences physiques, les abus sexuels, administratifs et économiques.(2)
Le contrôle coercitif peut être mal compris et réduit à la violence psychologique et/ou l’emprise dans le contexte français. Depuis juillet 2010, les violences psychologiques au sein d’un couple qui « dégradent la qualité de la vie et provoquent une altération de l’état de santé physique ou mentale » sont une infraction pénale en France.(3)
Les personnes reconnues coupables risquent jusqu’à cinq ans d’emprisonnement et une amende de 75 000 €.(4)
Suite au Grenelle des violences conjugales en 2019, le gouvernement français a annoncé un certain nombre de mesures qu’il prendra pour lutter contre les violences conjugales.(5)
La notion de l’emprise a ensuite été incluse dans la loi n° 2020-936 du 30 juillet 2020, qui vise à protéger les victimes de violences conjugales.(6)
Le terme emprise, qui signifie être sous l’influence ou la domination d’une autre personne, est souvent mal traduit et mal interprété comme « contrôle coercitif ».
Le contrôle coercitif se concentre sur le schéma d’un comportement oppressif et répétitif de l’auteur envers sa victime, comme la privation de droits et de ressources, la surveillance ainsi que la micro-régulation et le contrôle du comportement.(7)
L’emprise, quant à elle, peut être définie comme ce que vit la victime et n’est qu’un aspect du contrôle coercitif.(8)
Le contexte européen
La Convention du Conseil de l’Europe sur la Prévention et la Lutte contre la Violence à l’égard des Femmes et la Violence Conjugale (Convention d’Istanbul) utilise le terme « violence psychologique », au lieu de « contrôle coercitif », pour décrire une infraction intentionnelle « portant gravement atteinte à l’intégrité psychologique d’une personne par la contrainte ou la menace. »(9)
Bien que le contrôle coercitif ne soit pas spécifiquement reconnu dans la Convention, les articles 33 et 46 sont pertinents lorsqu’on considère le contrôle coercitif comme une forme répétée ou continue de violence psychologique.(10)
Comportements et tactiques des auteurs de contrôle coercitif
Les auteurs utilisent souvent une combinaison de tactiques et/ou tirent parti de faiblesses ou d’insécurités perçues afin d’exercer leur pouvoir et leur contrôle sur la victime. Voici quelques exemples, non exhaustifs, de ces comportements :
- isoler la personne de ses amis et de sa famille ;
- la priver de ses besoins fondamentaux ;
- surveiller son emploi du temps ;
- la surveiller via des outils de communication en ligne ou des logiciels espions ;
- prendre le contrôle de certains aspects de sa vie quotidienne, comme les endroits où elle peut aller, les personnes qu’elle peut voir, ce qu’elle peut porter et quand elle peut dormir
- la priver de l’accès à des services de soutien, tels qu’une aide spécialisée ou des services médicaux ;
- la rabaisser de façon répétée, par exemple en lui disant qu’elle ne vaut rien ;
- appliquer des règles et des activités humiliantes, dégradantes ou déshumanisantes pour la victime
- forcer la victime à prendre part à des activités criminelles, telles que la négligence ou la maltraitance d’enfants, pour la faire culpabiliser et s’assurer qu’elle n’alerte pas les autorités ;
- abuser financièrement de la victime, en ne lui accordant, par exemple, qu’une allocation dérisoire ;
- menacer de blesser ou de tuer ;
- menacer un enfant ;
- menacer de révéler ou de publier des informations privées (par exemple, menacer de révéler l’orientation ou l’identité sexuelle de quelqu’un contre son gré) ;
- agresser ;
- infliger des dommages criminels, comme la destruction d’articles ménagers ;
- violer ;
- empêcher une personne d’avoir accès aux transports ou de travailler.(11)
Un cas médiatisé de contrôle coercitif ayant entraîné la mort
Le 19 février 2020, Rowan Baxter a assassiné son ancienne compagne Hannah Clarke et leurs trois enfants dans le Queensland, en Australie.(12)
Hannah Clarke avait subi des années de violences psychologiques, économiques et sexuelles de la part de son conjoint, qui contrôlait et surveillait ses déplacements, les personnes qu’elle pouvait voir, ce qu’elle pouvait porter, son accès à l’argent, et menaçait de nuire à leurs enfants si elle n’avait pas de relations sexuelles avec lui. Les tactiques utilisées dans ce cas sont toutes des exemples de contrôle coercitif. Les violences ont également continué après que Clarke a quitté Baxter, quelques mois avant qu’il ne l’assassine.
Statistiques clés
- Le sociologue et travailleur social médico-légal américain Evan Stark a publié un rapport en 2012, qui a révélé qu’entre 60 et 80 % des femmes qui demandent de l’aide pour des violences conjugales ont subi un contrôle coercitif, y compris de multiples tactiques pour les effrayer, les isoler, les dégrader et les subordonner, ainsi que des agressions et des menaces.(13)
- Au cours de l’année se terminant en mars 2020, 24 856 infractions de contrôle coercitif ont été enregistrées par la police en Angleterre et au Pays de Galles, contre 16 679 au cours de l’année se terrminant en mars 2019. Cette augmentation pourrait être attribuée aux améliorations apportées par la police pour reconnaître les incidents de contrôle coercitif et, en conséquence, à l’utilisation du Serious Crime Act de 2015.(14)
- Au cours de l’année se terminant en décembre 2019, 1 057 prévenus ont été poursuivis en Angleterre et au Pays de Galles pour comportements contrôlants ou coercitifs en combinaison avec une autre infraction. Les coups et blessures ordinaires étaient l’infraction pour laquelle les défendeurs étaient le plus souvent poursuivis, combiné à un comportement de contrôle ou de coercition.(15)
- Un examen des homicides liés aux violences conjugales en Nouvelle-Galles du Sud, en Australie, entre mars 2008 et juin 2016, a révélé que sur 112 homicides, 111 comportaient des tactiques de contrôle coercitif par l’agresseur sur sa victime avant de l’assassiner.(16)
Arguments en faveur de la criminalisation du contrôle coercitif
Les partisans de la criminalisation du contrôle coercitif affirment que ces lois contribueraient à modifier la manière dont les autorités comprennent et répondent à la violence de genre et à mieux tenir les auteurs pour responsables, en se concentrant sur la violence conjugale en tant que schéma de violence, plutôt qu’en tant qu’incidents isolés.(17)
La criminalisation du contrôle coercitif améliorerait la prise de conscience de la société et renforcerait la sécurité des femmes en se concentrant sur les schémas de violence plutôt que sur des incidents isolés, et sur toutes les formes de violence plutôt que sur la seule violence physique.(18)
L’introduction du contrôle coercitif dans les codes pénaux permettrait aux procureurs d’accéder à davantage de preuves pour établir la présence de violences conjugales y compris, entre autres, aux documents financiers, à des communications téléphoniques et numériques, et aux déclarations de témoins.(19)
Arguments contre la criminalisation du contrôle coercitif
Les opposants à la criminalisation du contrôle coercitif soutiennent qu’une réforme législative réussie reposerait sur la volonté et la capacité des victimes à impliquer la police. Cependant, les victimes hésitent souvent à signaler les sévices.(20)
Cela peut être dû à la peur de ne pas être crues, que les violences s’intensifient si la police intervient, ou d’être tenues responsables de sévices commis à leur encontre.
Pour les affaires portées devant les tribunaux, une question clé est de savoir comment prouver la coercition. Considérées individuellement, de nombreuses tactiques de contrôle coercitif ne sont pas criminelles, ce qui peut rendre l’obtention de preuves difficile.
Sans une réflexion approfondie, la criminalisation du contrôle coercitif peut donner aux victimes un faux sentiment de sécurité qui, à son tour, pourrait nuire à leur sécurité.
Légiférer sur l’infraction du contrôle coercitif peut également encourager les forces de l’ordre à attendre l’émergence d’un modèle de violence avant de procéder à une arrestation, plutôt que d’agir sur un incident isolé.(21)
Certains affirment que la criminalisation du contrôle coercitif pourrait avoir un effet négatif sur les populations marginalisées qui, dans de nombreux pays, sont déjà confrontées à des problèmes d’interventions policières excessives et de discrimination raciale.(22)
Les barrières linguistiques, par exemple, pourraient conduire à une mauvaise identification de l’auteur et empêcher la police de bien comprendre la situation.
Les partisans de la criminalisation du contrôle coercitif affirment que ces problèmes peuvent être résolus par une législation soigneusement rédigée, des investissements dans la formation des officiers de justice et l’éducation du public.
Pays ayant criminalisé le contrôle coercitif, pays examinant le contrôle coercitif
En 2015, l’Angleterre et le Pays de Galles sont devenus les premiers pays au monde à légiférer contre « les comportements de contrôle ou de coercition dans une relation intime ou familiale », avec l’adoption de la loi Serious Crimes Act de 2015, rendant le contrôle coercitif passible d’une peine pouvant aller jusqu’à cinq ans de prison.(23)
Après l’Angleterre et le Pays de Galles, en 2018, l’Écosse et l’Irlande ont adopté des lois similaires sur le contrôle coercitif et les violences conjugales.(24)
L’État de Tasmanie en Australie est devenu la première juridiction du pays à inclure des infractions spécifiques pour criminaliser des éléments du contrôle coercitif, tels que l’intimidation, la violence économique et psychologique.(25)
Toutefois, de plus en plus d’appels sont lancés pour que le contrôle coercitif devienne une infraction pénale dans toute l’Australie. En septembre 2020, le parti Labor du NSW a présenté au Parlement un projet de loi visant à criminaliser le contrôle coercitif, avec une peine maximale de dix ans.(26)
En novembre de la même année, une alliance fédérale multipartite a été formée, appelant à une approche nationale pour comprendre et criminaliser le contrôle coercitif.(27)
Le gouvernement du Queensland a également annoncé cette année son intention de mettre en place un groupe de travail indépendant chargé de mener des consultations sur une éventuelle législation en matière de contrôle.(28)
Législation des meilleures pratiques pour criminaliser le contrôle coercitif.
Le Domestic Abuse Act écossais de 2018 sur les violences conjugales, qui est entré en vigueur le 1er avril 2019, est considéré comme la référence absolue au niveau mondial pour la criminalisation du contrôle coercitif et des violences conjugales.(29)
Votée à l’unanimité par le gouvernement écossais, la législation crée une infraction spécifique de « comportement abusif envers [un/une] partenaire ou ex-partenaire , qui couvre non seulement les violences physiques, mais aussi les sévices psychologiques et les comportements coercitifs et contrôlants.(30)
Il peut s’agir d’un agresseur qui isole sa victime de ses amis et de ses proches, qui contrôle ses activités quotidiennes, qui l’effraie ou l’humilie.(31)
Conformément à la Convention d’Istanbul, la législation écossaise reconnaît également l’impact négatif de la violence conjugale et du contrôle coercitif sur les enfants
Focus: L’ordonnance de protection
L‘ordonnance de protection permet au juge aux affaires familiales d’assurer dans l’urgence la protection de victimes de violences conjugales ou intrafamiliales. |
Focus: « L’ordonnance de protection «
L’ordonnance de protection pour femmes battues : les violences conjugales sont un phénomène qui prend de plus en plus d’ampleur.
Pendant très longtemps, on a refusé d’en parler.
Et bien sûr, on n’a rien fait, laissant très souvent des femmes battues seules face à un mari ou un concubin violent.
Heureusement, le législateur a fini par s’emparer du dossier.
Il en résulte qu’aujourd’hui il existe toute une panoplie de mesures destinées à venir en aide aux victimes de ces violences.
Parmi ces mesures, il y a l’ordonnance de protection, prévue et réglementée aux articles 515-9 et suivants du Code civil.
Explications et conseils.
1. Définition de l’ordonnance de protection.
L’ordonnance de protection est une décision rendue par le juge aux affaires familiales visant à protéger et à organiser la vie familiale des personnes victimes de violences conjugales.
Elle est donc une mesure de protection judiciaire qui vise à garantir l’intégrité physique et la tranquillité de la victime, mais aussi celle de ses enfants.
Il s’agit donc là d’une véritable avancée dans le droit de la famille.
Songez qu’il aura fallu attendre la loi du 09.07.2010 pour que cette possibilité et cette reconnaissance soient enfin données aux femmes battues.
Il existe quelques cas qui ont concerné des hommes battus, mais 99 % des cas concernent des femmes battues par leur conjoint.
2. Qui est concerné ?
Toutes les personnes victimes de violences de la part de leur compagnon ou ancien compagnon.
Cette précision est importante : il n’est pas nécessaire que le couple existe encore.
Peuvent donc être placées sous le statut protecteur de l’ordonnance de protection les personnes suivantes :
- les personnes mariées ;
- les personnes en instance de divorce ou de séparation de corps ;
- les personnes divorcées ;
- les concubins ;
- les ex-concubins ;
- les personnes liées par un P.A.C.S ;
- les personnes ayant mis fin à un P.AC.S. .
- les enfants : il appartiendra alors à leur parent, non-auteur des violences, d’intenter la procédure spécifique à l’ordonnance de protection.
Le législateur a donc voulu permettre au plus grand nombre de personnes victimes de violences conjugales de bénéficier de ce statut protecteur.
Quelles sortes de violences sont-elles visées ?
3. Quelles sont les violences conjugales concernées ?
Les violences pouvant déclencher le mécanisme de l’ordonnance de protection sont diverses.
Il peut s’agir de :
- violences physiques : coups et blessures ;
- violences psychologiques : insultes, menaces, dénigrements, harcèlement, surveillance constante, jalousie extrême, pressions diverses, etc ;
- violences sexuelles : attouchements, actes imposés, viols, etc.
- violences « matérielles » : privation de ressources, de denrées, vols, dilapidation des économies, etc.
On le constate, les hypothèses sont multiples et traduisent toutes des actes de violence, quelle qu’en soit la nature.
ATTENTION : il n’existe pas d’échelle de gravité.
Bien entendu, les violences physiques et les violences sexuelles sont celles qui emportent avec elles la plus forte réprobation et cela est bien normal.
Mais un tribunal ne vous fera jamais ressentir que votre cas ne mérite pas que l’on y prête attention.
Autrement dit, vous pouvez solliciter la protection de l’autorité judiciaire même en ne vous prévalant que de violences matérielles.
TOUTES les violences sont graves et toutes permettent d’obtenir une ordonnance de protection.
Quelles sont alors les mesures de protection possibles ?
4. Que va contenir l’ordonnance de protection ?
Le juge aux affaires familiales peut décider de mettre en place diverses mesures pour assurer la protection de la victime de violences.
Ainsi le magistrat pourra décider des mesures suivantes :
-
L’attribution du domicile conjugal à la victime des violences conjugales.
L’auteur des violences devra quitter le domicile sous un délai que le juge aux affaires familiales lui laissera, mais qui sera très court.
Il importe peu ici que le bail ait été signé aux deux noms, voire au seul nom du conjoint auteur des violences : ce dernier devra partir si l’ordonnance de protection le prévoit.
Si la victime des violences souhaite ensuite quitter ce domicile, et si elle en est locataire, elle bénéficiera d’un préavis réduit d’un mois au lieu de trois.
-
L’interdiction d’entrer en contact avec la victime des violences conjugales.
Cette obligation va souvent de pair avec la première.
L’auteur des violences aura l’obligation de quitter le domicile conjugal, mais aussi de ne plus prendre contact avec sa victime.
C’est souvent la seule manière pour celle-ci de se reconstruire et de retrouver un peu de sérénité.
ATTENTION : il sera inutile pour l’auteur des violences de jouer au plus malin : l’interdiction d’entrer en contact concerne tous les moyens de communication.
L’auteur des violences conjugales ne pourra donc pas téléphoner à sa victime, ni lui envoyer de sms ou de mails, ni lui laisser des messages sur son répondeur et bien sûr encore moins se présenter au domicile conjugal, quelles qu’en soient les raisons.
-
L’obligation de porter un bracelet anti-rapprochement.
Il s’agit là de la mesure la plus récente (elle a été mise en place en août 2020) mais qui peut se révéler très efficace.
L’auteur des violences conjugales devra porter un bracelet anti-rapprochement qui est un dispositif de géolocalisation.
Le juge aux affaires familiales va déterminer un périmètre que le porteur du bracelet n’aura pas le droit de franchir.
Si celui-ci viole ce périmètre, le centre de surveillance qui gère ce dispositif est immédiatement alerté et la police peut intervenir sans délai.
Cela est donc extrêmement rassurant pour les victimes qui sont ainsi assurées que leur conjoint ne s’approchera pas d’elles.
Seul bémol : cette mesure nécessite l’accord des deux parties.
Si l’auteur des violences refuse le port d’un tel bracelet, on ne peut l’y contraindre.
Cependant, le Procureur de la république sera alerté de ce refus.
-
L’interdiction de porter une arme.
Il s’agit là d’une mesure de précaution.
Si l’auteur des violences conjugales est détenteur d’une arme, il devra la remettre au service de police ou de gendarmerie désigné dans l’ordonnance de protection.
Cette mesure de précaution va souvent de pair avec l’interdiction d’entrer en contact avec la victime.
-
La dissimulation de l’adresse de la femme battue.
La victime des violences conjugales peut demander à ce que son adresse ne figure par dans l’ordonnance de protection, afin que son conjoint ne la retrouve pas.
Il s’agit là d’une mesure importante, car on a vu des cas dans lesquels l’auteur des violences conjugales se rendait à l’improviste au domicile de sa victime pour en découdre avec elle et exercer de nouvelles violences.
Dans cette hypothèse, l’adresse mentionnée sera celle du cabinet de son avocat.
Bien sûr, cette mesure n’a de sens que si la victime a quitté le domicile conjugal pour se loger ailleurs.
-
Les mesures relatives aux enfants.
Le sort des enfants est bien entendu pris en compte par le juge aux affaires familiales.
Cela est d’autant plus nécessaire qu’ils sont eux aussi les victimes, directes ou indirectes, des violences portées sur leur mère.
Le juge aux affaires familiales va prendre les mesures suivantes : résidence des enfants, autorité parentale, droit de visite et d’hébergement et pension alimentaire.
Ce sont en réalité les mêmes mesures que celles qui sont prises dans le cadre d’un divorce.
-
Les mesures d’ordre financières.
Le juge peut octroyer à la victime une pension alimentaire que devra lui verser l’auteur des violences, pour elle-même ou pour les enfants.
Il peut également condamner le conjoint auteur des violences à participer aux frais et charges du mariage.
5. Comment obtenir une ordonnance de protection ?
Pour obtenir une telle mesure, il faut préparer son dossier.
Il faudra déposer une requête auprès du juge aux affaires familiales en expliquant dans le détail quelles sont les violences dont vous avez été victime.
IMPORTANT : si vous avez peur de votre conjoint, vous n’êtes pas obligée de donner votre adresse dans la requête. (Cette possibilité n’a de sens que si vous avez quitté le domicile conjugal)
Pour cela, il faut bien entendu compiler toutes les preuves possibles relatives à l’existence des violences :
- certificats médicaux ;
- témoignages ;
- mains courantes ;
- plaintes ;
- condamnations antérieures ;
- sms ;
- mails ;
- messages vocaux ;
- etc.
Tout ce qui permettra de rendre vraisemblables les violences, et donc votre statut de femme battue, devra être produit au tribunal.
Ne vous dites jamais que telle ou telle pièce n’est pas importante : tous les éléments de preuve sont importants, même ceux qui pourraient vous paraître insignifiants.
C’est la conjonction de tous ces indices qui vous permettra d’obtenir l’ordonnance de protection.
Une fois votre requête déposée, vous serez convoquée par le juge.
L’auteur des violences sera lui aussi convoqué.
Le juge entendra alors chacune des parties et leurs avocats respectifs.
Une fois cette audience achevée, le juge aura un délai de 6 jours pour rendre sa décision.
Attention à ne pas ignorer l’ordonnance !
6. L’obligation de respecter l’ordonnance de protection.
ATTENTION : l’ordonnance de protection est une décision de justice.
L’auteur des violences a donc intérêt à respecter toutes les prescriptions qui y figurent.
Si l’auteur des violences ne respecte pas les obligations qui lui sont imposées, il s’expose à des poursuites pénales et risque :
- une peine d’emprisonnement de deux ans ;
- une amende de 15.000 euros ;
Il peut en plus être condamné d’un point de vue civil à verser des dommages et intérêts à sa victime.
Si vous bénéficiez d’une ordonnance de protection et que vous constatez que l’auteur des violences viole ses obligations, avertissez immédiatement le tribunal et déposez plainte.
La sanction pénale suivra rapidement.
7. Et ensuite ? Que faire ?
La durée de validité de l’ordonnance de protection est de 6 mois.
Il faut donc agir.
Dans la plupart des cas, la femme battue, si elle est mariée avec l’auteur des violences, a introduit une procédure en divorce pour fautes.
Si tel est le cas, et si la première audience de cette procédure en divorce n’a pas encore eu lieu, vous pourrez solliciter le renouvellement de l’ordonnance pour une nouvelle durée de 6 mois.
Si la première audience a lieu durant le premier délai de 6 mois, le juge aux affaires familiales, saisi de votre dossier de divorce, pourra rendre une nouvelle ordonnance fixant les mesures provisoires applicables durant la procédure en divorce et dans laquelle il pourra décider de reprendre les mesures de protection fixées dans l’ordonnance initiale.
Si vous n’êtes pas mariée avec l’auteur des violences, il faudra profiter de ce délai de 6 mois pour vous trouver un logement si vous souhaitez quitter le domicile que vous avez loué avec votre ancien concubin.
Dans un cas comme dans l’autre, rien ne vous interdit de porter plainte pour les violences dont vous avez été victime.
En tout cas, un dernier conseil s’impose : ne restez pas sans réagir.
Les violences conjugales sont un fait inacceptable.
Elles doivent selon moi être sanctionnées de la manière la plus ferme.
N’hésitez donc pas à utiliser la procédure ainsi mise en place pour vous.
Ce sera dans la plupart des cas la seule manière de vous en sortir, vous et vos enfants.
Le cabinet est bien entendu à votre entière disposition pour intervenir.
REINS Didier
Avocat
17d, rue de Molsheim
67000 STRASBOURG
Tel : 03 88 32 42 15
Fax : 09 57 20 42 15
Mail : reins.avocat@gmail.com
Site Web : https://reinsdidier-avocat.com
Focus: « Le cycle des violences »
Dans une relation conjugale marquée par la violence, le cycle se répète plus ou moins régulièrement et s’accélère avec le temps. En voici le processus, inspiré du schéma du Regroupement provincial des maisons d’hébergement et de transition pour femmes victimes de violence conjugale « La violence conjugale … c’est quoi au juste ? – brochure 1er trimestre 2006 » :
PHASE 1 : L’ESCALADE
Mise en place du système d’emprise
L’agresseur exerce des pressions psychologiques, contrôle, isole la victime.
La victimese sent inquiète, tente d’améliorer le climat, fait attention à ses propres gestes et paroles.
PHASE 2 : L’EXPLOSION
Épisode de violences (quelle que soit la forme)
L’agresseur donne l’impression de perdre le contrôle de lui-même mais prend en fait le contrôle de la situation.
La victime ne comprend pas et tente de calmer la situation.
PHASE 3 : LE TRANSFERT
Minimisation de la violence
L’agresseur porte la responsabilité des violences sur sa partenaire.
La victime se sent responsable de la situation.
PHASE 4 : LA « LUNE DE MIEL »
Moyen utilisé par l’auteur pour reconquérir la victime
L’agresseur promet un changement.
La victime lui donne une chance, lui apporte son aide, constate ses efforts,change ses propres habitudes.
L’ACCÉLÉRATION DES ÉPISODES DE VIOLENCE LAISSE LA VICTIME DE PLUS EN PLUS ÉPUISÉE,
Dans la confusion quant à l’analyse de sa situation et des responsabilités, dans le doute sur ses capacités à s’en sortir. Il faudra un événement déclencheur pour que la victime comprenne que son conjoint cherche à la détruire et que sa vie (et celle de ses enfants éventuellement) est en danger.
Focus: 3919, numéro national à destination des femmes victimes de violences
3919 – Violences Femmes Info
Anonyme, accessible 24h/24 et 7j/7, gratuit depuis un poste fixe ou mobile en métropole, comme dans les départements d’outre-mer, ce numéro d’écoute national est une référence pour l’écoute et l’orientation à destination des femmes victimes de violences sexistes.
Les appels peuvent concerner tous les types de violences sexistes : violences conjugales, violences sexuelles, mariages forcés, mutilations sexuelles féminines, violences au travail), de leur entourage et des professionnels concernés. Ce numéro national garantit une écoute, une information et, en fonction des demandes, une orientation adaptée vers les dispositifs locaux d’accompagnement et de prise en charge.
Au 3919, en plus du français, il est possible d’obtenir des informations, une orientation ou une écoute téléphonique dans 12 langues différentes : anglais, arabe, créole, dari, espagnol, hébreu, kabyle, mandarin, persan, polonais, portugais et turc. Cependant, les écoutantes ou chargées de pré-accueil pouvant assurer ce service ne sont pas présentes 24h/24. Aussi, l’appelant·e pourra être invité·e à rappeler aux horaires indiqués par l’équipe du 3919.
Le fonctionnement de ce numéro, géré par la Fédération Nationale Solidarité Femmes et soutenu par le Secrétariat d’État chargé de l’égalité entre les femmes et les hommes, s’appuie sur de forts liens partenariaux avec les principales associations nationales agissant pour l’égalité femmes/hommes, pour les droits des femmes et luttant contre les violences sexistes et sexuelles qui leur sont faites.
Il s’agit notamment de : l’association européenne contre les violences faites aux femmes au travail (AVFT) ; l’association Femmes solidaires ; l’association Voix de Femmes ; le Centre national d’information des droits et des familles (FNCIDFF) ; le Collectif féministe contre le viol (CFCV) ; la Fédération Nationale du Groupe pour l’Abolition des Mutilations Sexuelles Féminines, des Mariages Forcés et autres pratiques traditionnelles néfastes à la santé des femmes et des enfants (Fédération Gams) ; et le Mouvement français pour le planning familial.
Le 3919 assure dès lors un premier accueil pour toutes les femmes victimes de violences sexistes. Lorsque c’est nécessaire, les chargées de cet accueil orientent vers les associations nationales ou locales partenaires, les mieux à même d’apporter la réponse la plus adaptée.
Le 3919 et la Fédération Nationale Solidarité Femmes
Une femme sur 10 est victime de violences conjugales (enquête ENVEFF, 2001) et une femme décède tous les 3 jours sous les coups de son compagnon (étude de la Délégation aux Victimes – Ministère de l’Intérieur, 2013). Telles sont les informations qui ont fait prendre conscience à l’opinion publique que la violence conjugale est un fléau social, un problème de société que les pouvoirs publics doivent prendre en compte.
Dès 1992, la Fédération Nationale Solidarité Femmes créait le service téléphonique national d’écoute « Violence Conjugale – Femmes Info Service » devenu le 3919 -Violences Conjugales Info en 2007. En 2014, les missions du 3919 sont donc étendues à la réponse à toutes les formes de violences faites aux femmes.
Une équipe d’écoutantes professionnelles assure une écoute bienveillante qui permet à la personne qui appelle de parler de la situation vécue dans un climat de confiance. L’objectif de cette écoute est de permettre à la personne d’agir, grâce aux informations apportées sur les démarches à suivre. Le but est, dans la mesure du possible, d’orienter la femme victime vers une association spécialisée qui pourra l’accompagner dans le parcours de sortie des violences qu’elle subit.
En cas de danger immédiat, appelez la police, la gendarmerie ou les pompiers en composant le 17 ou le 18.
Focus: Porter plainte pour violences conjugales
Les violences au sein d’un couple font partie des plus délicates du fait de la proximité et de l’attachement entre l’auteur et la victime qui se retrouve confrontée à des sentiments ambivalents. Pourtant, il est important d’agir vite en déposant une plainte avant que la situation ne se répète. Comment s’y prendre dans une telle situation ? À qui s’adresser ? Explications.
-Qu’est-ce qu’un dépôt de plainte ?
Le dépôt de plainte permet à une victime de dénoncer l’auteur de son agression afin de demander à la justice sa condamnation pénale (amende, prison).
-Qui peut porter plainte pour violences conjugales ?
Vous pouvez porter plainte pour violence conjugale à partir du moment où vous en êtes victime et êtes en couple, c’est-à-dire uni par un mariage, un PACS ou en concubinage.
-Comment porter plainte pour violences au sein du couple ?
Pour que la plaine pour violence conjugale soit recevable, vous devez la déposer dans les 6 années qui suivent les faits. Pour cela, différents procédés sont à votre disposition.
Vous pouvez d’abord vous présenter dans un commissariat de police ou une brigade de gendarmerie. Vous n’êtes pas tenu par une sectorisation particulière néanmoins, il est préférable de s’orienter vers le service de proximité qui sera plus à même d’intervenir rapidement en cas d’urgence. Une messagerie instantanée vous permet désormais d’échanger avec un agent de police et de signaler un acte de violence au sein du ménage.
Ensuite, il est aussi possible de déposer plainte auprès du procureur de la République par papier libre en indiquant l’état civil du plaignant, le nom de l’auteur de l’infraction, le récit des faits, le lieu et la date de l’infraction, les coordonnées des éventuels témoins, une estimation du préjudice et tout document servant de preuve (certificat médical, arrêt de travail, etc.).
Enfin, vous pouvez exceptionnellement adresser votre déclaration au juge d’instruction en vous portant partie civile.
Bon à savoir : Il existe de nombreux services en capacité de vous proposer assistance en cas de violence. N’hésitez pas à contacter le 3919 (Violences Femmes Info, accessible 24h sur 24 et 7 jours sur 7), une association France Victimes via le numéro 116 006 ou à consulter le site parcours-victimes.fr.
Focus: Emprise psychologique : signes, couple, travail, en sortir
L’emprise psychologique correspond à une forme de manipulation mentale qui mène à la dépendance affective. Tout le monde peut un jour être sous l’emprise de quelqu’un : dans son couple, en amitié, au travail, avec un parent…
Elle s’installe souvent insidieusement et se traduit par un ascendant psychologique, mêlant manipulation, chantage et dépendance affective, que ce soit dans le couple, en amitié, dans le milieu familial ou au travail. Sur le long terme, elle peut avoir de lourdes conséquences pour celui qui la subit. Et ce n’est pas l’apanage des victimes des pervers narcissiques. Tout le monde peut un jour se retrouver sous l’emprise d’une personne. Quels sont les signes pour la reconnaître ? Comment s’en sortir et retrouver une forme de liberté ? Définition et conseils d’Aline Nativel Id Hammou, psychologue clinicienne.
Définition : c’est quoi l’emprise psychologique ?
On peut tous, à un moment donné de sa vie, vivre dans une forme d’emprise psychologique ou relationnelle avec certaines personnes.
L’emprise psychologique correspond à une forme d’ascendance psychologique, de manipulation mentale voire de « torture psychique » récurrente utilisée dans le but de victimiser une personne et parvenir à ses fins. Elle peut se manifester dans de nombreuses situations de la vie quotidienne : au sein du couple, avec un parent, en amitié, au travail… « On peut tous, à un moment donné de sa vie, vivre dans une forme d’emprise psychologique ou relationnelle avec certaines personnes, comme une sorte de perte de contrôle ou de maîtrise. Peu importe son âge, son niveau intellectuel, socioprofessionnel ou que l’on soit un homme ou une femme. Le mot « emprise » induit qu’il y a un rapport de dominant/dominé. Or, les enjeux relationnels sont un peu plus complexes que ça. On n’est pas toujours dans un profil de « victimologie » pure dans le sens où l’emprise n’est pas forcément si puissante et destructrice, tant qu’elle est conscientisée. L’emprise peut même avoir, dans certaines situations de vie, certains bénéfices, notamment dans le couple, en amitié, au travail… Lorsqu’on a conscience de cette emprise, on peut parfois y gagner quelques avantages et l’utiliser sur le court terme comme une stratégie. Néanmoins, il faut que cette emprise ne persiste pas trop longtemps, sinon elle devient problématique« , prévient Aline Nativel Id Hammou. L’emprise psychologique peut concerner :
- le couple, avec une emprise exercée par son conjoint ;
- le travail, avec une emprise exercée par un collègue, un manager ou un supérieur hiérarchique ;
- la famille, avec une emprise ou une manipulation exercée par un parent, un oncle, une tante, un grand-parent…
- l’amitié, avec une emprise exercée par un(e) ami(e), souvent toxique ;
- plus rarement, une secte, avec une emprise exercée par « un gourou ».
Amitié toxique : quels signes, quand faut-il arrêter ?
Jalousie, manipulation, culpabilisation… Un(e) ami(e) toxique se nourrit de votre énergie tel un « vampire ». Comment reconnaître ce type de relation malsaine et comment y faire face ? Signes typiques et conseils pour s’en sortir.
Quels sont les signes d’une personne sous emprise ?
L’emprise psychologique est une sorte de jeu de rôles où la victime (la personne dominée) ne choisit rien et où tout est imposé par celui qui a le pouvoir (la personne dominante). La reconnaître peut être difficile et prendre du temps. Toutefois, certains signes sont typiques d’une emprise psychologique.
- La personne sous emprise psychologique a une faible estime d’elle-même. « La personne dominante va « vider » la confiance en soi de la victime, pour garder son influence et pour faire taire ses traits de personnalité« , indique notre interlocutrice.
- La victime vit avec la peur de perdre l’autre ou de perdre ses « avantages ». « Elle est complètement dépendante de la personne dominante, et se sent incapable de vivre sans elle« , précise notre psychologue. Elle a tendance à être dans le déni et à minimiser l’emprise.
- Le dominant a tendance à utiliser la menace, le chantage ou des stratégies perverses (par de la jalousie, du mépris, des humiliations, du dénigrement, des insultes, des actes de harcèlement, des mensonges, une dépendance financière…) pour parvenir à ses fins et pour faire culpabiliser sa victime si la situation ne va pas dans son sens. Il peut avoir une grande exigence de perfection envers sa victime et même éprouver un certain plaisir à voir cette personne sous son emprise. Son chantage ou ses menaces peuvent être interrompues par des phases de flatterie, d’empathie, de tendresse ou de gentillesse. Le dominant devient alors compréhensif (surtout en présence d’autres personnes) et montre un visage diamétralement opposé à celui du manipulateur, un peu comme un « Dr Jekyll et Mister Hyde ».
- Le dominant a tendance à isoler sa victime du monde extérieur, pour renforcer son lien d’emprise et éviter que son entourage ne l’éloigne de lui.
5 signes évocateurs d’une relation de couple toxique (et comment en sortir !)
Votre partenaire use du chantage affectif, se victimise, vous fait culpabiliser ? Cette relation amoureuse est peut-être toxique. Voici les signes typiques et les conseils de notre psychologue pour vous en rendre compte et en sortir avant de perdre totalement confiance en vous.
Emprise psychologique dans le couple
Une relation de couple saine respecte l’autonomie et la liberté de l’autre, ainsi que les divergences d’opinion.
« Il peut parfois y avoir des déséquilibres dans le couple, mais ça fait partie de la vie à deux. Les rôles ne sont pas toujours fixes : il y a des périodes où on est le dominant, d’autres où on est le dominé. Là où ça devient problématique, c’est lorsque les rôles ne changent jamais, que le déséquilibre persiste et qu’il devient inconfortable voire malsain« , détaille notre interlocutrice. Autrement dit, chacun peut chercher, à un moment donné, à influencer l’autre pour parvenir à ses fins. Néanmoins, lorsque ce comportement se transforme en mécanisme systématique et déviant, il ne doit pas être accepté. Une relation de couple saine respecte l’autonomie et la liberté de l’autre, ainsi que les divergences d’opinion. Ainsi, si vous ressentez régulièrement de la honte, une culpabilité, des difficultés à communiquer, de la peur, une anxiété en présence de votre partenaire, un sentiment d’injustice, une impression de vous faire « fliquer », il peut s’agir potentiellement d’une emprise relationnelle.
Emprise psychologique parentale
Un parent qui est dominateur, méprisant, qui vous fait de nombreuses critiques, qui n’est pas capable de vous offrir un soutien, qui dénigre vos choix, qui contrôle vos décisions, qui vous fait culpabiliser à outrance, qui se victimise en permanence, à qui vous devez tout votre temps, votre énergie, vos réussites… peut correspondre à une forme d’emprise psychologique. « On peut être sous emprise au sein de sa famille, avec un parent par exemple et ne pas aller à l’encontre de cette posture par devoir ou par loyauté. En revanche, si cette emprise devient inconfortable ou destructrice, il faut essayer de s’en sortir et d’y mettre un terme« , conseille notre spécialiste.
Emprise psychologique au travail
L’emprise psychologique peut survenir sur le lieu de travail, de la part d’un collègue, d’un collaborateur ou d’un supérieur hiérarchique qui peut user et abuser de la manipulation pour parvenir à ses fins. Avec l’aide de la séduction dans un premier temps (de prime abord, le manipulateur a tendance à se montrer à l’écoute, compréhensif et ouvert), puis avec la peur, le chantage, le dénigrement et les menaces dans un second temps. Le manipulateur est difficilement repérable, mais présente un comportement typique : il a tendance à tirer la couverture à lui, à s’attribuer tous les mérites, à retourner la situation, à pointer les erreurs des autres, à se montrer flou ou ambigu dans ses demandes, à faire porter la responsabilité de ses erreurs sur d’autres, à agir en faux-gentil ou en faux-modeste, à faire de la rétention d’informations importantes, à diviser son équipe pour « mieux régner »…
De prime abord, le manipulateur a tendance à se montrer à l’écoute, compréhensif et ouvert.
Une personne qui vient d’arriver dans l’entreprise est une proie particulièrement facile car elle a tendance à ne pas se rebeller par crainte de mettre en péril son devenir professionnel. Peu importe le temps passé dans l’entreprise, lorsque vous sentez qu’il y a un abus émotionnel de la part d’un collaborateur – qui peut se traduire par du flicage à outrance, une fatigue émotionnelle, une peur d’aller au travail, une perte d’efficacité, un burn-out professionnel – parlez-en autour de vous, essayez de récolter des avis d’autres personnes dans votre entreprise et n’hésitez pas à solliciter l’aide des ressources humaines.
Quelles sont les conséquences de l’emprise psychologique ?
Lorsqu’elle persiste et dure dans le temps, une emprise psychologique peut mener à :
- Une dépendance affective de la victime envers son manipulateur.
- Une perte de liberté et d’autonomie, avec un isolement et un fort repli sur soi.
- Des troubles relationnels, avec une incapacité à avoir confiance en l’autre.
- Une personnalité/identité profondément affectée par cette expérience relationnelle destructrice pour la victime qui a le sentiment de ne plus être elle-même et de ne plus se reconnaître (sentiment de dépersonnalisation).
- Une dépression pouvant entraîner des idées suicidaires.
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Comment sortir de l’emprise psychologique ?
Ce qu’il ne faut pas faire dans le cas d’une emprise psychologique
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« Il est tout à fait possible de sortir d’une emprise psychologique à condition d’être accompagné et de ne pas rester isolé« , prévient d’emblée notre psychologue. Cela se fait progressivement :
► Première étape : le déconditionnement. Dans un premier temps, la victime devra reconnaître la toxicité et la réalité des dérives de l’emprise relationnelle. Elle devra réduire progressivement l’admiration ressentie pour le manipulateur, afin de lui donner de moins en moins de crédit (phase de désidéalisation). Elle pourra écrire une lettre à la personne manipulatrice, qu’elle n’enverra pas mais dans laquelle elle mettra des mots sur ses souffrances. S’entourer et ne pas minimiser le soutien de ses proches restent primordial. Il ne faut pas hésiter à en parler à son entourage, à demander de l’aide et des conseils pour prendre du recul sur la situation, ne plus être tenté d’accepter l’inacceptable et retrouver une certaine forme de liberté et d’autonomie, ainsi que ses capacités de jugement. L’entourage doit, avec tact et compréhension, amener la victime à réfléchir et à prendre conscience sur ce qui est normal ou pas dans une relation, puis la laisser faire ses propres conclusions. Cela prend du temps, il faut être patient.
► Deuxième étape : la reconstruction. Il est tout à fait possible de se faire accompagner par un professionnel de santé (psychologue, psychiatre, assistant social, intervenant social à domicile, sophrologue, hypnothérapeute…) si nécessaire. Cela va permettre de faire « un travail essentiel sur l’estime de soi car très souvent la victime se sent bête, idiote, coupable, honteuse voire responsable de la situation lors de sa prise de conscience« , indique Aline Nativel Id Hammou. Cela va aussi permettre à la victime de réapprendre à vivre en dehors de la relation d’emprise et de retrouver une indépendance affective. Il est aussi conseillé de lire des ouvrages sur la thématique de l’emprise relationnelle (Sortir de l’emprise et se reconstruire de Julie Arcoulin, L’emprise au travail: La comprendre, s’en libérer de Wadih Choueiri, Se libérer de l’emprise émotionnelle de Sylvie Tenenbaum…). Participer à des groupes de paroles ou à des ateliers de gestion de la vie quotidienne peut également être une bonne solution pour récolter des témoignages et prendre conscience que l’on est pas seul à subir ce genre d’emprise. Enfin, on peut aussi travailler sur le corps avec le recours au théâtre, au chant, à la méditation, au yoga, à l’art-thérapie…
Quelles sont les causes chez le manipulateur ?
L’emprise psychologique peut se faire de manière consciente ou inconsciente. Parfois, le manipulateur ne se rend pas compte de ses actes. De manière générale, l’emprise psychologique traduit une blessure, un vide intérieur ou un manque de confiance en soi. En agissant ainsi, le manipulateur compense ses souffrances et met à distance ses peurs en ayant un ascendant et en faisant souffrir les autres. La manipulation est comme un moteur pour lui. Dans certains cas, l’emprise psychologique est liée à certains troubles psychiques comme les troubles de la personnalité (sociopathie, psychopathie) ou à une tendance à la perversion (pervers narcissique, perversion morale…).
Le féminicide : enjeu majeur de société.
Les crimes commis spécifiquement contre les femmes sont une réalité sociale qui alerte les pouvoirs publics et les chercheurs. Un ouvrage, On tue une femme. Histoire et actualité du féminicide (L. Bodiou, F. Chauvaud, M.-J. Grihom, L. Gaussot et allii., Hermann, 2019), réalisé par des collègues membres de plusieurs laboratoires poitevins, ainsi que la MSHS, avec l’appui de la Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances de l’Assemblée Nationale, et le concours d’un laboratoire de recherche de l’Université Paris Diderot est paru. Les contributions scientifiques permettent de prendre la mesure du phénomène et de comprendre les débats actuels.
Faits divers /faits de société/faits de vocabulaire
De tout temps et en tous lieux, des femmes ont été maltraitées, brutalisées et élevées dans une culture de l’infériorité. Les violences exercées contre elles, du mariage forcé aux coups répétés, sont des violences de genre qui induisent une sorte de banalité, voire d’impunité, conduisant au crime de sang. Lorsque l’On tue une femme en raison de son sexe, il s’agit d’un féminicide qui est un crime de haine contre les femmes, pour ce qu’elles sont ou ce qu’elles représentent. De nombreux pays d’Amérique latine ont fait figurer la notion de féminicide dans les législations nationales. Du continent asiatique auquel les filles « manquent », à l’Amérique du Nord, en passant par les pays européens qui tentent de légiférer, sans oublier l’Afrique et les organisations internationales, dont l’ONU et l’OMS, une prise de conscience s’est fait jour : le féminicide est un fléau universel et le défi majeur des sociétés au XXIe siècle. Le mot a fait son apparition dans un dictionnaire français, Le Robert, en 2015.
Une recherche pluridisciplinaire
Une équipe poitevine, associant des enseignants-chercheurs de diverses disciplines, histoire, droit, médecine légale, anthropologie, sociologie, psychologie, travaille depuis plusieurs années sur la thématique des violences faites aux femmes : des colloques, des journées d’études à l’université de Poitiers, où à l’Assemblée Nationale, à l’invitation, à plusieurs reprises, de la Délégation parlementaire aux droits des femmes et à l’égalité ont jalonné ces diverses initiatives, d’abord concrétisées par un premier ouvrage Le corps en lambeaux (PUR, 2016, Préface de Catherine Coutelle et postface de Michelle Perrot), puis, tout récemment par Une femme sur trois. Les violences faites aux femmes d’hier à aujourd’hui, (Éditions de l’Atlantique, 2019), prolongeant une exposition itinérante présentée à l’Espace Mendès France.
Plutôt qu’une tentative d’explication définitive, le lecteur lira au fil des pages la grande diversité des approches, sans pour autant se disperser, sur ces actes meurtriers dirigés contre les femmes parce qu’elles sont des femmes. La démographie, l’histoire de l’art, les sciences de l’information et les sciences politiques apportent d’utiles compléments.
L’épaisseur du féminicide
« Fémicide » ou « féminicide » le crime commis contre des femmes parce qu’elles sont femmes possède une histoire. Le féminicide peut-être systémique – les tueurs de femmes dans l’histoire ou les tueries perpétrées au Guatemala ou à Ciudad Juárez, au Mexique, sans oublier les femmes natives du Canada, les crimes d’honneur, les avortements sexués, les fœticides. Il est aussi intime et correspond aux crimes conjugaux commis par des maris, des ex-époux, des conjoints ou compagnons ou ex-compagnons. Le mot féminicide lui-même n’a rien d’idéologique, il relève du constat établi par exemple dès 2012 par l’ONU femmes qui l’adopte. Aujourd’hui des juristes s’interrogent pour savoir s’il faut introduire le mot dans le Code pénal, à la manière de nombreux pays d’Amérique Latine, mais chacun reconnaît qu’il est nécessaire de reconnaître la réalité des féminicides.
En somme, cet ouvrage nous apprend comment le terme féminicide a été et est un formidable accélérateur pour saisir l’actualité des crimes commis contre les femmes. Observateurs sociaux, journalistes, pouvoirs publics ont été obligés de sortir du silence et de composer avec lui et de donner une réponse, plus ou moins forte en fonction des espaces nationaux. On tue une femme est aussi une invitation à poursuivre les travaux et à œuvrer pour lutter contre les violences faites aux femmes, devenues un enjeu majeur de société.
La comptabilité macabre, dont les chiffres ne varient guère en France d’une année à l’autre, livre des informations précises et incontestables : « 123 femmes ont été tuées par leur partenaire ou ex-partenaire intime « officiel » (conjoint, concubin, pacsé ou « ex ») ou non officiel (petits amis, amants, relations épisodiques…) ; 34 hommes ont été tués par leur partenaire ou ex-, dont trois au sein de couples homosexuels ; 25 enfants mineurs sont décédés, tués par un de leurs parents dans un contexte de violences au sein du couple ». Le féminicide à notre porte est un crime de propriétaire.
LES DIFFÉRENTS TYPES DE VIOLENCE CONJUGALE
La violence conjugale se développe par cycles de plus en plus rapprochés dont l’intensité et la fréquence peuvent conduire à la mise en danger de la victime et de ses enfants.
Les gestes ou comportements violents font partie d’une stratégie pour contrôler ou imposer à l’autre sa volonté en utilisant les coups, l’humiliation, le dénigrement, les insultes, les menaces, le chantage. La violence conjugale constitue un abus de pouvoir et de confiance. Elle entrave des relations basées sur l’égalité et le respect. L’isolement, la honte, le poids des idées reçues, les sentiments de culpabilité et d’échec, plongent les victimes dans le silence, les empêchent d’agir et d’envisager une issue à la souffrance.
La violence verbale
La violence verbale peut s’entendre. Si certains hommes violents vont, élever le ton, pour intimider leurs compagnes, d’autres, au contraire, vont prendre une voix plus suave, la victime reconnaîtra bientôt cette tonalité dangereuse. Un autre gardera son timbre habituel, mais abreuvera d’injures, de menaces, de sarcasmes sa compagne.
La violence psychologique
La violence psychologique s’exprime par des attitudes diverses, des propos méprisants, humiliants. Le compagnon violent renvoie à la victime une image d’incompétence, de nullité. Il l’atteint dans son image à travers le regard des autres. Progressivement la victime perd confiance en elle-même, en ses possibilités. Peu à peu s’installe le désespoir, une acceptation passive de ce qui arrive. Elle s’isole, s’enferme dans sa honte, n’ose plus prendre d’initiative. Cette violence peut conduire à la dépression, à l’alcoolisme, au suicide.
La violence économique
La violence économique exercée différemment selon les milieux (allocations familiales jouées ou dépensées au bar ; revenus déposés sur un compte joint dont lui seul détient la signature, carnets de chèques et carte bancaire ; biens immobiliers de madame qui disparaissent sous la gestion bienveillante de monsieur…), cette violence aura pour objet de déposséder la victime de toute possibilité d’autonomie financière.
La violence sexuelle
La violence sexuelle est la plus cachée. La personne violente oblige sa compagne à avoir des rapports sexuels malgré elle, avec lui ou avec d’autres partenaires selon ses propres fantasmes, parfois il la forcera à se prostituer. Les viols, les agressions sexuelles, les rapports acceptés sous la contrainte ou pour le calmer sont réguliers. Les victimes ont beaucoup de mal à en parler parce qu’elles restent associées aux obligations du mariage et du devoir conjugal.
La violence physique
La violence physique, contrairement à une idée répandue, n’est pas toujours présente dans des situations de violence conjugale. Le partenaire utilise cette forme de violence quand sa compagne manifeste encore trop d’indépendance à son goût, quand il n’a pas réussi à contrôler tous les comportements de celle-ci. Il passe donc aux coups, à la brutalité ou à la contrainte physique.
La violence administrative
La violence administrative est la confiscation de documents (carte nationale d’identité, permis de conduire, livret de famille, carte vitale…). Elle concerne notamment les femmes d’origine étrangère. La rupture de la vie commune peut avoir une incidence sur le droit de séjourner sur le sol français. Il arrive, également, à l’occasion d’un séjour à l’étranger, que le conjoint confisque le passeport de sa femme pour l’empêcher de revenir sur le sol français.