Chronique littéraire Janvier 2023 : Silence on cogne

Pour débuter l’année, j’ai décidée de mettre en avant un livre qui traite d’une :

Enquête sur les violences conjugales subies par des femmes de gendarmes et de policiers.

 

 

Alizé Bernard a été victime de violences conjugales. Si elle savait les difficultés qu’ont les femmes à parler et à se faire entendre, elle n’imaginait pas combien le statut de son conjoint rendrait son combat pour s’en sortir plus difficile encore. Car ce dernier était gendarme. Or comment faire quand celui qui vous bat se sert de son statut, représentant de l’ordre, de sa place dans l’institution policière, de sa connaissance des procédures et des liens supposés de solidarité avec ses collègues, pour vous intimider, vous dissuader de vous défendre et faire valoir vos droits ?

A Sophie Boutboul, journaliste travaillant sur les violences faites aux femmes, elle a accepté de raconter son histoire ; les mois de silence, isolée en caserne, persuadée que nul n’accepterait de la croire, la peur démultipliée devant un homme incarnant la loi et disposant d’une arme de service, puis les années de luttes, seule, pour faire valoir ses droits malgré les obstacles qu’elle dénonce  ; les tentatives de dissuasion de certains gendarmes, les procédures non respectées, l’absence de sanction hiérarchique, l’indulgence de certains juges. L’impression de se battre contre un système.

Au récit de son combat étape par étape, répond, en alternance, l’enquête qu’a menée Sophie Boutboul. Car le cas d’Alizé n’est pas isolé. Chaque année, des femmes meurent sous les coups et les balles de leur conjoint policier ou gendarme. Pendant un an et demi, elle a sillonné le pays pour recueillir le témoignage de femmes ayant connu le même chemin de croix  : les tentatives de dissuasion, les menaces, les procédures caduques, la protection, voire l’impunité, dont certains ont joui du fait de leur statut. Pour en comprendre les raisons, elle a rencontré des avocats, juges, magistrats, les membres d’associations aidant des femmes dans le même cas, les familles des victimes, mais aussi des policiers et des gendarmes reconnaissant les conséquences de leur métier sur leur vie personnelle et l’absence de mesures pour les prévenir, et les hauts placés de l’IGPN et de l’IGGN, les instances d’inspection de la police et de la gendarmerie. Elle expose les failles d’un système qui ne pense pas la place des femmes auprès d’hommes exposés à la violence et les risques que cela implique.

C’est un texte engagé qu’Alizé Bernard et Sophie Boutboul signent là. Pour permettre aux femmes victimes de telles violences de savoir qu’elles ne sont pas seules. Ouvrir le débat et proposer des pistes de réflexion, des solutions, pour protéger les victimes de ces violences particulières.

Lien: 

Silence, on cogne, de Sophie Boutboul, Alizé Bernard | Éditions Grasset

 

Violences conjugales : « J’ai pu voir une violence plus cachée commise par des hommes extrêmement bien installés socialement »

– 208.000 victimes de violences conjugales ont été enregistrées en 2021 par les services de police et de gendarmerie.

– Le journaliste et romancier Mathieu Palain a enquêté durant quatre ans sur ces hommes qui agressent leurs conjointes ou ex-partenaires.

– On a voulu savoir quel est leur profil et pourquoi frappent-ils ?

Les statistiques faisant état des femmes qui meurent sous les coups de leur conjoint font froid dans le dos : 146 femmes assassinées en 2019, 102 en 2020, 113 en 2021. Mais avant d’en arriver au pire, il y a la violence quotidienne, insidieuse. Une gifle, un geste brusque, des coups, des rapports non consentis. Car il existe aussi un autre chiffre : 220.000 femmes en moyenne déclarent chaque année subir des violences conjugales, ce qui équivaut somme toute à 220.000 hommes violents. 

« Et ce qui est inquiétant, c’est que les experts considèrent qu’il faut multiplier ce chiffre par quatre ou cinq parce que toutes les femmes ne portent pas plainte », explique Mathieu Palain, auteur du livre « Nos pères, nos frères, nos amis. Dans la tête des hommes violents », à paraître le 12 janvier aux Éditions Les Arènes. À la suite de son podcast à succès « Les hommes violents », réalisé en 2019 en immersion dans un groupe de parole, Mathieu  Palain a poursuivi son enquête durant quatre ans avec de nouveaux témoignages sur ces hommes qui violentent celles qu’ils disent aimer, battant en brèche quelques idées reçues.

« Des médecins, des avocats, des banquiers »

Lors de l’écriture de votre livre, vous avez constaté que les auteurs de violences peuvent venir de milieux aisés, les profils ont-ils autant évolué ?

Àla base, j’avais une représentation un peu biaisée des auteurs de violences conjugales. J’avais l’image d’une brute alcoolique et bas de plafond, qui frappe sa femme parce qu’elle a brûlé le gratin ou trop salé la soupe. En fait, les chiffres sont suffisamment énormes pour voir que ces couples viennent de tous les milieux. Mais sur le terrain, ce qui m’a permis de me rendre compte de l’extrême diversité des profils, c’est d’aller d’une part du côté des auteurs qui sortent de prison, qui ont été condamnés. Là, on a des profils assez classiques, représentatifs de la population carcérale française, c’est-à-dire des hommes qui pour beaucoup sont issus de la classe moyenne basse, voire de classes plus défavorisées. Tandis que du côté des victimes, par leur témoignage, j’ai pu voir aussi une violence plus cachée, qui passe sous les radars, commise par des hommes extrêmement bien installés socialement, vivant dans des beaux appartements avec des métiers très bien payés : des médecins, des avocats, des banquiers, des directeurs de théâtre… Il faut dire que c’est plus difficile de porter plainte pour les femmes, quand elles sont issues d’un milieu social aisé, il y a le ‘qu’en dira-t-on’ et aussi la peur du poids de la justice surtout quand il y a des enfants. La majorité d’entre elles préfère donc partir sans que leur conjoint soit inquiété.

Les hommes que j’ai interrogés sont beaucoup dans le déni. Certains refusent même de prononcer ces mots : ‘j’ai battu ma femme’ alors que toutes les preuves les accablent.

Durant ces quatre ans d’enquête sur le terrain, avez-vous perçu une prise de conscience croissante ?

Les hommes que j’ai interrogés sont beaucoup dans le déni. Certains refusent même de prononcer ces mots : ‘j’ai battu ma femme’ alors que toutes les preuves les accablent. Ils sentent que ce n’est pas quelque chose dont ils peuvent se vanter, ce qui n’était pas le cas il y a encore 40 ou 50 ans – où presque personne ne s’offusquait qu’un homme batte sa femme parce qu’elle avait mal fait ci ou mal fait ça. Ce déni est aussi dû au fait qu’ils ont bien conscience que cette norme, qui autorisait le chef de famille à avoir autorité sur tout le monde, femme et enfants, n’est plus possible. On a une société qui évolue même si on aimerait que ça aille plus vite. Par ailleurs, depuis le mouvement MeToo, les hommes ont aujourd’hui une réaction de défense, car le message qui est véhiculé dans le monde entier les dépasse. Ce qui pousse certains à renverser les choses et à dire que les femmes ont maintenant le pouvoir et que la justice est dans leurs mains.

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Pour autant, les hommes violents peuvent-ils changer ?

Ce que j’ai vu, c’est que la violence n’est pas quelque chose que vous avez en vous. C’est quelque chose que vous apprenez en imitant ou en y étant confronté. Dans mon livre, j’évoque un chercheur qui parle de ‘contagion de la violence’ qui serait un virus qu’on se transmet en y étant exposé. Y être exposé, ça veut dire pour certains grandir dans un quartier violent avec des codes de la violence et ça veut dire aussi grandir dans un foyer violent. En fait, si vous apprenez depuis tout petit à régler vos problèmes et les conflits par les poings, quand vous vous sentez méprisé ou humilié, vous agissez de la même façon. La manière avec laquelle on réagit est aussi lié à la manière avec laquelle on a été élevé, à ce qu’on a vu, à ce qu’on a côtoyé. Une autre chercheuse, Liliane Daligand, qui a expertisé plus de 700 hommes violents, évoque, elle, une grande immaturité de la part de ces hommes liée à l’image d’une mère toute-puissante. On est dans une société qui a vocation à punir pour réintégrer donc je pense que le travail mené par les associations ou les groupes de parole, même si ce n’est pas la solution pour tous, peut avoir des effets bénéfiques. En revanche, éviter la récidive chez des hommes de 65 ou 70 ans, je pense que c’est très difficiles. Les chances sont minimes.


Virginie Fauroux

Qu’est ce que la violence conjugale ?.

Selon la définition, la violence conjugale se caractérise par une série d’actes répétitifs, qui se produisent généralement selon une courbe ascendante.

Les spécialistes appellent cette progression « escalade de la violence ». Elle procède, chez l’auteur(e) de la violence, selon un cycle défini par des phases marquées par la montée de la tension, par l’agression, par la déresponsabilisation, par la rémission et par la réconciliation. À ces phases correspondent, chez la victime, la peur, la colère, le sentiment qu’elle est responsable de la violence et, enfin, l’espoir que la situation va s’améliorer. Toutes ces phases ne sont pas toujours présentes et ne se succèdent pas toujours dans cet ordre.

 

La violence conjugale comprend les agressions psycholo­giques, verbales, physiques et sexuelles ainsi que les actes de domination sur le plan économique. Elle ne résulte pas d’une perte de contrôle; c’est plutôt un moyen pour dominer l’autre personne et pour affirmer son pouvoir sur elle. Elle peut être vécue dans une relation maritale, extra-conjugale ou amoureuse, à tous les âges de la vie.

QUELQUES CHIFFRES

Il faut également retenir que 8 victimes de violence conjugale sur 10 sont des femmes. Aussi, près de 1 travailleuse sur 3 a déjà subi de la violence conjugale.

Les conséquences de la violence conjugale sont sociales, écono­miques, physiques et psychologiques. Pour plus de la moitié des personnes victimes, la violence se poursuit au travail, rapporte le magazine Affaires universitaires. On parle de :

  • harcèlement par téléphone ou par texto (40,6 %);
  • harcèlement par courriel (15,6 %);
  • communication de l’agresseur aux collègues ou à l’employeur (14,5 %);
  • suivre la victime ou la harceler à proximité du travail (20,5 %);
  • l’intrusion sur les lieux du travail (18,2 %).

Toujours selon l’article de Melissa Fundira paru dans Affaires universitaires, on observe plusieurs conséquences sur le milieu de travail :

  • baisse d’énergie ;
  • confusion ;
  • diminution de l’attention ;
  • difficulté à prendre des décisions ;
  • hausse de l’absentéisme (notamment pour participer au processus judiciaire) ;
  • diminution de la productivité annuelle de 1,7 % à 2,7 % chez les personnes victimes de violence conjugale.

Des conséquences s’observent également au sein de l’équipe de travail de la personne victime :

  • sentiment d’insécurité ;
  • sentiment d’impuissance ;
  • prise du rôle de sauveur ;
  • anxiété ;
  • etc.

La littérature démontre que la période entourant une rupture de la relation conjugale est le moment où les risques de féminicide et d’infanticide sont les plus importants. Une étude publiée par Statistique Canada en 2001 rapporte que 49 % des homicides conjugaux sont commis dans les 2 mois suivant la séparation, 32 % dans les 2 à 6 mois qui la suivent et 19 % plus d’un an après celle-ci.

ET LA VIOLENCE COERCITIVE?

De plus en plus, les personnes intervenant dans le milieu utilisent le concept de violence coercitive. Théorisée en 2007 par Evan Stark, dans l’ouvrage Coercive control : How men entrap women in personal life, la violence coercitive est définie par le ministère de la Justice du Canada comme :

« un processus cumulatif et structuré qui survient lors­qu’un conjoint ou un ancien conjoint adulte tente, par des moyens émotionnels et psychologiques, physiques, économiques ou sexuels, d’exercer à l’égard de l’autre une coercition, une domination, une surveillance, une intimidation ou une autre forme de contrôle. »

Concrètement, la violence coercitive se manifeste par :

  • la privation des droits et des ressources (droit à la liberté, à l’autonomie, etc.);
  • la surveillance;
  • des manifestations de violence (physique, psychologique, etc.);
  • des paroles blessantes;
  • de l’isolement;
  • de la domination;
  • de l’exploitation.

Plus précisément, l’agresseur peut utiliser :

  • l’intimidation (p. ex., menaces de se suicider ou de partir avec les enfants) ;
  • le harcèlement lors de surveillance des déplacements et des contacts ;
  • la fouille des affaires personnelles de la victime ;
  • l’isolement (p. ex., lorsque l’agresseur interdit à la victime de parler ou de côtoyer certaines personnes) ;
  • la privation (p. ex., le contrôle financier ou l’interdiction d’obtenir des soins médicaux).

Les concepts de violence conjugale et de violence coercitive sont complémentaires.

En somme, la violence conjugale a comme leitmotiv la prise de contrôle. Celle-ci se manifeste par une série d’actes répétitifs. Généralement, elle s’installe graduellement, puis progresse insi­dieusement et de façon cyclique.

LE PRIVÉ EST POLITIQUE

Les féministes des années 1970 scandaient haut et fort que le privé est politique. Ce slogan dénonçait que le lieu privilégié de la domination masculine est justement la sphère dite privée.

Les féministes de l’époque réclamaient à la fois un rôle d’actrices dans la société et dénonçaient la violence qu’elles subissaient une fois la porte du domicile familial fermée. Plus encore, le mouvement des femmes affir­mait que les droits des femmes sont des droits de la personne.

Les choses ont évolué, mais ont-elles vraiment changé ?

Avec les nouvelles technologies de la communication, les auteurs de la violence utilisent la cyberviolence. Appels, textos, géolocalisation, espionnage, sextage et piratage des comptes sont largement utilisés. Il s’agit d’un autre exemple qui fait dire que le privé est poli­tique, car les victimes de violence conjugale n’ont jamais de répit, même au travail.

La violence conjugale est un enjeu social qui dépasse la sphère privée. Ainsi, il est de l’affaire de toutes et de tous de la contrer et de soutenir les victimes, y compris dans leur milieu de travail. Les employeurs et les syndicats ont donc un rôle clé à jouer.

«Certaines femmes sont poussées à bout»: les suicides, la face cachée des violences conjugales

DÉCRYPTAGE – Une statistique inédite du ministère de l’Intérieur alourdit le bilan d’une femme morte tous les trois jours.

Passé sous les radars, le chiffre fait froid dans le dos. Les services de police et de gendarmerie ont enregistré 684 victimes ayant tenté de se suicider ou s’étant suicidées à la suite du harcèlement de leur conjoint ou ex-conjoint en 2021. Un phénomène massif, mais une donnée peu visible dans les bilans de lutte contre les violences conjugales.

Ce chiffre, issu du service statistique du ministère de l’Intérieur, n’apparaît en effet qu’au détour de la dernière lettre de l’Observatoire national des violences faites aux femmes, parue fin novembre. «Il n’est sans doute pas mis en avant parce qu’il vient gonfler les statistiques de mortalité liée aux violences conjugalesL’inclure dans le bilan annuel de féminicides reviendrait à tripler ce chiffre, relève Yael Mellul, présidente de l’association Femme et libre et ancienne avocate spécialisée dans les violences conjugales. Malheureusement, on ne fait pas le distinguo entre les tentatives de suicide et les suicides.» L’Observatoire national des violences faites aux femmes indique également que 229 femmes se seraient suicidées ou aurait fait une tentative en 2020. «Le chiffre d’une femme morte tous les trois jours de violences conjugales est en tout cas largement sous-évalué», note Ernestine Ronai, fondatrice de l’Observatoire départemental des violences envers les femmes de Seine-Saint-Denis.

En 2022, entre le 1er janvier et le 26 décembre, 106 femmes ont été tuées par leur conjoint ou ex-conjoint, selon le dernier décompte du collectif Féminicides par compagnons ou ex. Ces derniers jours de décembre ont été marqués par la mort d’une sexagénaire, en Dordogne, dont le mari a été écroué mardi. Après une violente agression par son ex-compagnon, le 13 décembre, à Blois, une femme de 24 ans est encore entre la vie et la mort. Ce drame a relancé le débat sur la protection des victimes de violences conjugales alors que la jeune femme s’était rendue quelques heures avant son agression dans un commissariat, où on l’avait invitée à revenir le lendemain.

Violence psychologique

Pendant le Grenelle des violences conjugales, en 2019, le groupe d’experts Psytel avait donné une estimation du nombre de suicides forcés. Selon leur projection, 217 femmes s’étaient donné la mort en France en 2018 à la suite de violences psychologiques, physiques et/ou sexuelles. Dans la foulée, le suicide forcé a été reconnu comme une circonstance aggravante du harcèlement moral au sein du couple. Un nouvel article du code pénal porte désormais à dix ans d’emprisonnement et à 150.000 euros d’amende le harcèlement d’un conjoint conduisant à un suicide ou à une tentative de suicide. «Avant, on ne prenait en compte que les coups, mais la violence psychologique, le harcèlement sont au moins aussi dangereux, relève Ernestine Ronai. Ces suicides commencent à sortir de l’ombre. Désormais, les policiers et les gendarmes se mettent à les repérer, ce qui permet de les compter. Mais ils sont encore sous-évalués. Il faudrait davantage d’enquêtes sur ces suicides et les tentatives de suicide pour comprendre ce qui s’est passé».

Menaces, insultes, manipulation, harcèlement téléphonique ou bancaire, plaintes à répétition, pression sur la garde des enfants, piratage des réseaux sociaux… Les agresseurs utilisent parfois bien d’autres armes que la violence physique. «Certaines femmes sont poussées à bout. Elles ont le sentiment de ne pas être entendues et pensent ne jamais pouvoir s’en sortir. Cette impression de vivre une histoire sans fin peut les mener au suicide», décrit Ernestine Ronai.

Des agresseurs peuvent aller très loin, avec des destructions de biens, des démarches judiciaires à répétition dès qu’elles essaient de porter plainte. Elles se sentent parfois acculées sur le plan financier. Elles n’ont plus de travail, plus d’amis

Françoise Brié, directrice de la Fédération nationale solidarité Femmes (FNSF)

Certaines femmes qui appellent le 3919 expriment clairement «une envie de mourir», confirme Françoise Brié, directrice de la Fédération nationale solidarité Femmes (FNSF), qui gère la ligne d’écoute. «Dans nos appels, c’est un sujet récurrent. Un certain nombre de femmes disent avoir eu envie d’en finir parce qu’elles ne savent pas comment arrêter ce cycle infernal. Ce qu’elles ont traversé peut aussi laisser de graves séquelles psychiques. Des agresseurs peuvent aller très loin, avec des destructions de biens, des démarches judiciaires à répétition dès qu’elles essaient de porter plainte. Elles se sentent parfois acculées sur le plan financier. Elles n’ont plus de travail, plus d’amis», poursuit-elle.

Des familles de victime appellent aussi parfois le 3919 après un suicide dans un contexte de violences conjugales parce qu’elles ne veulent pas que l’agresseur reste dans l’impunité. Si le code pénal permet désormais de le reconnaître, aucun jugement n’a pour l’instant été prononcé. Deux affaires sont en cours d’instruction: celle d’Odile, une femme de 50 ans retrouvée morte un jour de l’An sur la plage de la Mitre, à Toulon, et l’affaire de Maeva, une influenceuse connue sous le pseudo Mavachou, qui s’est suicidée et dont l’ex-mari est accusé de harcèlement. «Cette infraction est complexe à faire reconnaître, car il faut établir l’existence de violences psychologiques et un lien de causalité entre ces violences et le passage à l’acte suicidaire», reconnaît Yael Mellul. Cette dernière déplore que le ministère de la Justice n’ait sorti aucune circulaire sur ce nouveau délit.