Actualité :  » Les violences conjugales en France ont augmenté de 15% sur un an »

Quelque 244.000 victimes ont été dénombrées par les forces de sécurité en 2022. La majorité des victimes sont des femmes, précise le ministère de l’Intérieur.

Seule une victime sur quatre a porté plainte

«Dans un contexte de libération de la parole et d’amélioration des conditions d’accueil des victimes par les services de police et de gendarmerie, le nombre de victimes enregistrées a ainsi doublé depuis 2016», observe ce service.

Les victimes sont des femmes à 87% et les mis en cause des hommes à 89%. Seule une victime sur quatre a porté plainte. Les deux tiers des violences rapportées sont d’ordre physique, 30% d’ordre verbal ou psychologique et 5% sont des violences sexuelles.

«Comme en 2021, la Seine-Saint-Denis, la Guyane, le Pas-de-Calais, le Nord et la Réunion sont les départements qui affichent les plus forts taux de victimes enregistrées pour 1000 habitantes âgées de 15 à 64 ans», selon le ministère.

Chronique littéraire:  » Prendre son envol »

Il y a maintenant deux années, presque jour pour jour. Je disais stop à l’escalade de la violence dans mon couple.

Un enchainement d’événements m’a conduites à renoncer à cette vie et à ce que j’ai connu durant 9 années aux côtés du père de mes enfants.

Aux portes du tribunal, après le délibéré, la sanction est tombée. Un regard à mon papa, un mélange d’émotion, et une phrase que je garderais toujours en mémoire  » Je veux faire quelque chose pour aider ses femmes, je veux contribuer, raconter, comprendre! ». 

Je n’ai jamais lâchée cette idée. Après beaucoup de réflexion, petit à petit l’idée de créer cette association met venue mais pas seulement !

J’ai trouvé! Je vais raconter cette histoire, mon histoire, notre histoire. Dire tout haut, ce que les gens ne voient pas. Je veux briser les tabous d’une vie qui semble si paisible, et démontrer les ravages de cette violence « invisible ». La violence morale et psychologique. 

Par chance, une amie proche étais en contact avec une écrivaine : Justine Cazeirgues écrivaine, spécialiste des récits de vie et des biographies pour particuliers. Justine Caizergues, Romancière pro, Ecrivain public Montpellier

Une première approche téléphonique, une entente quasiment instantanée. Touchée par mon histoire et mon combat nous avons décidé de travailler main dans la main pour créer  » ce 5 IIème bébé » comme je le nomme désormais.

Des entretiens téléphoniques, d’une heure en moyenne en fréquence d’une à deux fois par mois; je ressasse ma vie, notre  vie, de notre rencontre, en passant par mes grossesses, les petites anecdotes de ce quotidien, sans doute similaire à beaucoup.

En parlant, en me livrant à Justine, je met le doigt sur toutes ces petites choses qui me paraissaient insignifiantes, happés par l’amour que je lui porté et cette  » emprise » qui s’était immiscée dans notre relation. J’ouvre les yeux sur toutes ces choses que j’ai acceptées, tolérées.

Cette échange et ce travail à duré près d’un an et demi. De rédaction, d’écoute, de partage. De cela est né il y a 2 mois maintenant mon témoignage portant, le nom de mon association  » Prendre son envol ». 

Je ne remercierais jamais assez Justine de son aide, de son implication, de son professionnalisme quant au respect de mes récits et mes ressentis retranscrits parfaitement.

L’aboutissement d’un grand projet. 

Mais ce n’était que la première étape. Je devais me lancer, désormais seule dans l’étape la plus périlleuse afin de mener à terme ce projet. Cette histoire est écrite! Désormais, je désir qu’elle soit lue !

La recherche d’un éditeur et d’un distributeur. L’esprit remplit de doute et d’incertitude j’entame les démarches envoi du manuscrit à plusieurs maisons d’éditions accompagné d’une lettre présentant le livre et mon engagement.

L’attente. L’attente peux parfois être très longue pour obtenir une réponse, quelle qu’elle soit d’ailleurs, positive ou négative. Les éditeurs évoquent des délais de 1 à 3 mois. Dans tout les cas la balle est dans leur camps.

Puis, un beau jour j’ouvre ma boite aux lettres… une maison d’édition m’avait répondu. Je dégrafe la lettre; nous souhaitons travailler avec vous afin de publier votre récit de vie accompagné d’un contrat. L’émotion qui m’a envahi en cette instant était unique. J’en ai pleuré.

Enfin, on a reconnu notre travail, on a été touché par mon histoire. On crois et on veux investir dans « mon » combat! Quel profond soulagement et sentiment de fierté !

Une semaine plus tard, une autre maison d’édition revenait vers moi, elle aussi pour signer la parution de mon livre.

Aujourd’hui, je suis encore en attente, du retour d’autres maisons d’éditions et en cours d’études des contrats qui me sont proposés afin de garantir mes droits et le meilleur avenir à ce livre que je porte en moi.

Mais une chose est certaine ; il sera diffusé et lu ! J’ai gagné mon pari. Ce pari fou, d’écrire mon histoire, de mettre en lumière ce phénomène « d’emprise » encore mal compris. 

Je vous tiendrais informé de la suite de cette magnifique aventure, que j’ai l’opportunité de vivre !

Focus: « Le cycle des violences »

Dans une relation conjugale marquée par la violence, le cycle se répète plus ou moins régulièrement et s’accélère avec le temps. En voici le processus, inspiré du schéma du Regroupement provincial des maisons d’hébergement et de transition pour femmes victimes de violence conjugale « La violence conjugale … c’est quoi au juste ? – brochure 1er trimestre 2006 » :Schéma cycle de la violence 2

 

PHASE 1 : L’ESCALADE
Mise en place du système d’emprise
L’agresseur exerce des pressions psychologiques, contrôle, isole la victime.
La victimese sent inquiète, tente d’améliorer le climat, fait attention à ses propres gestes et paroles.

PHASE 2 : L’EXPLOSION
Épisode de violences (quelle que soit la forme)
L’agresseur donne l’impression de perdre le contrôle de lui-même mais prend en fait le contrôle de la situation.
La victime ne comprend pas et tente de calmer la situation.

PHASE 3 : LE TRANSFERT
Minimisation de la violence
L’agresseur porte la responsabilité des violences sur sa partenaire.
La victime se sent responsable de la situation.

PHASE 4 : LA « LUNE DE MIEL »
Moyen utilisé par l’auteur pour reconquérir la victime
L’agresseur promet un changement.
La victime lui donne une chance, lui apporte son aide, constate ses efforts,change ses propres habitudes.

L’ACCÉLÉRATION DES ÉPISODES DE VIOLENCE LAISSE LA VICTIME DE PLUS EN PLUS ÉPUISÉE,
Dans la confusion quant à l’analyse de sa situation et des responsabilités, dans le doute sur ses capacités à s’en sortir. Il faudra un événement déclencheur pour que la victime comprenne que son conjoint cherche à la détruire et que sa vie (et celle de ses enfants éventuellement) est en danger.

Témoignage :  » Sonia, victime de violences conjugales : « Il me frappait, il a même voulu m’étrangler »

Sonia a rencontré son ex-compagnon il y a huit mois. Leur relation en a duré six et et a elle a subi des violences tout le long. Insultes, coups, viols. Elle raconte son calvaire, ce jeudi 25 novembre, journée contre les violences faites aux femmes. Attention, certains propos peuvent choquer.

Sonia est Icaunaise. Il y a huit mois, elle a rencontré son ex-compagnon. Leur relation a duré six mois pendant lesquels elle a été victime de violences conjugales. Elle accepte d’en parler ce jeudi 25 novembre, date de la journée internationale contre les violences faites aux femmes. 

La rencontre, puis la descente aux enfers

Au départ, tout commence plutôt bien. « On peut dire que c’était le début d’une belle histoire, parce qu’il m’a charmée et j’ai craqué sur lui. Des roses, du champagne, une bouteille de premier cru. Voilà le truc idéal, comme toute femme rêve« , raconte Sonia.

Mais le conte de fée tourne rapidement au cauchemar. Elle emménage chez lui, un mois après leur rencontre. C’est à ce moment-là que la descente aux enfers commence. « Là, c’était fini. J’avais signé mon arrêt de mort » confie-t-elle, les larmes aux yeux.

« Ce que j’ai vécu, c’est être persécutée tous les jours », raconte Sonia.

Ça a commencé par des insultes, puis des coups. C’est ensuite allé crescendo dans la violence. « Il m’humiliait. Il m’a craché dessus, craché dessus vous vous rendez compte ? Il m’a jeté de l’eau bouillante. Je lui disais d’arrêter, que j’avais mal, je pleurais, mais rien à faire. Il me frappait. Il a même voulu m’étrangler« , énumère Sonia. Cette femme de 42 ans est encore sous le choc, des mois après leur séparation.

Sonia raconte également avoir été victime de viols. « Il faisait ce qu’il voulait de moi, j’étais sa chose. Il m’a violée. Je ne savais même pas que le viol entre conjoint pouvait exister et pourtant les gendarmes me l’ont dit. Aujourd’hui, je le sais, je n’étais pas consentante. J’ai été violée à plusieurs reprises ! » s’exclame-t-elle.

Elle veut monter une association pour aider les femmes victimes de violences

Le choc laisse place à la détermination. « Je pense qu’au fur et à mesure que le temps va passer, j’arriverai à aller de l’avant. Je prends mon temps. Et je sais que je me dévouerai à cette cause. Je veux monter une association. Je veux toutes les aider« , explique Sonia.

Elle estime que la prise en charge de victimes de violences conjugales laisse à désirer. « J_e suis allée à la gendarmerie et je n’ai pas été correctement prise en charge »_ confie-t-elle_. « Ils ne m’ont même pas informée de mon droit à faire ma déposition en présence d’un avocat !_ » s’insurge-t-elle.

Pour elle, il n’y a pas de suivi pour les victimes. « Cet été, je suis allée me réfugier chez une amie. J’avais déjà porté plainte une fois. Il m’a retrouvée et je l’ai vu chercher ma voiture, tourner dans le quartier. Lorsque j’ai appelé les gendarmes, leur réponse m’a scotchée » poursuit-elle, en colère.

« Ils m’ont dit que la rue était un lieu public et qu’ils n’allaient pas intervenir. Mais enfin ! Ils se doutent bien que s’il me cherche, ce n’est pas pour me faire un bisou ! » conclut-elle.

Les plaintes ont abouti et Sonia a rendez-vous au tribunal, où son ex-conjoint doit être jugé à partir de la semaine prochaine.

Actualité : « Violences conjugales : quand l’arme est économique »

Elles sont une partie immergée de l’iceberg des violences conjugales. Dans « La Story », le podcast d’actualité des « Echos », Michèle Warnet et ses invitées font le point sur la forme que prennent les violences économiques, et sur les moyens de s’y attaquer.

Dans les situations de violences conjugales, le compte en banque peut  être une arme utilisée contre la victime. Selon l’association Solidarités Femmes qui est depuis plus de 30 ans derrière le 3919, numéro gratuit et accessible 24h/24 pour déclarer des faits de violences, les victimes économiques de leur conjoint représentaient près de 25 % des appels en 2021. Une augmentation de 6 points sur 2020.

Ces faits sont souvent plus tus et plus tardivement identifiés que ceux de violences physiques. Un refus de payer les frais de cantine d’un enfant ou le non-paiement d’une pension alimentaire en font pourtant partie. Cela peut aller jusqu’à la confiscation des moyens de paiement, au détournement des salaires ou des aides sociales ou encore à la prise de crédits engageant le conjoint victime sans son accord.

Leviers d’action

Il y a sur ces derniers faits des leviers d’action quand on est une banque ou un organisme de prestations sociales. La loi Rixain, entrée en vigueur fin 2022, précise que le salaire, les allocations ou les prestations sociales doivent désormais être versés sur un compte dont le bénéficiaire est le titulaire.

L’agence chargée du recouvrement des pensions alimentaires (Aripa) qui collecte directement les sommes dues auprès de l’ex-conjoint, afin de prévenir le risque de pension impayée a elle été mise en place en janvier 2023. Quant à l’entreprise, elle commence à s’emparer du problème . Le travail représentant pour beaucoup victimes un lieu sûr où l’écoute et la sensibilisation peuvent se développer.

La Story est un podcast des « Echos » présenté par Michèle Warnet. Cet épisode a été enregistré en décembre 2023. Rédaction en chef : Clémence Lemaistre. Invitées : Marion Heilmann et Marion Kindermans (journalistes aux « Echos »). Réalisation : Willy Ganne. Musique : Théo Boulenger. Identité graphique : Upian. Photo : Shutterstock. Sons : France 24, Emmanuel Macron, « A bout de souffle » (1960), Arte, Comité Droits des Femmes Monaco, Bloomberg, France 3, Solidarité Femmes Fédération Nationale, Ina, Sneaks « Tough Luck » (2016).

Chronique littéraire décembre : Il me tue cet amour – Comment je me suis reconstruite, après huit ans de violences conjugales

Il me tue cet amour – Comment je me suis reconstruite, après huit ans de violences conjugales

Synopsis:

 Un témoignage choc

« L’autrice livre son témoignage de femme battue par son conjoint et sa lente reconstruction. De 16 à 24 ans, elle a partagé la vie de Thomas, son « premier amour », qui l’a maltraitée physiquement et psychologiquement. Lorsqu’elle enfin osé fuir, au bout de 8 longues années, c’est pour Marie l’occasion d’un nouveau départ : elle déménage, trouve un travail et découvre la liberté de vivre et penser par elle-même.

Les 16 années qui suivent sont celles de la reconstruction, entre thérapies, naissances de ses enfants, confrontation à son ex conjoint et aux séquelles de la violence subie, et reconnaissance du traumatisme subi.

Aujourd’hui, Marie partage son histoire mais aussi tout ce qu’elle a compris des rouages de la violence et de son acceptation, de l’emprise et du déni.

S’adressant à un large public, ce livre souhaite donner des outils pour aider les victimes à reprendre le contrôle de leur vie, mais aussi aiguiller les accompagnants pour une prise en charge efficace et non culpabilisante.  »

Lien :

Amazon.fr – Il me tue cet amour – Comment je me suis reconstruite, après huit ans de violences conjugales – Gervais, Marie – Livres

Focus: 3919, numéro national à destination des femmes victimes de violences

3919 – Violences Femmes Info

Anonyme, accessible 24h/24 et 7j/7gratuit depuis un poste fixe ou mobile en métropole, comme dans les départements d’outre-mer, ce numéro d’écoute national est une référence pour l’écoute et l’orientation à destination des femmes victimes de violences sexistes.

Les appels peuvent concerner tous les types de violences sexistes : violences conjugales, violences sexuelles, mariages forcés, mutilations sexuelles féminines, violences au travail), de leur entourage et des professionnels concernés. Ce numéro national garantit une écoute, une information et, en fonction des demandes, une orientation adaptée vers les dispositifs locaux d’accompagnement et de prise en charge.

Au 3919, en plus du français, il est possible d’obtenir des informations, une orientation ou une écoute téléphonique dans 12 langues différentes : anglais, arabe, créole, dari, espagnol, hébreu, kabyle, mandarin, persan, polonais, portugais et turc. Cependant, les écoutantes ou chargées de pré-accueil pouvant assurer ce service ne sont pas présentes 24h/24. Aussi, l’appelant·e pourra être invité·e à rappeler aux horaires indiqués par l’équipe du 3919.

Le fonctionnement de ce numéro, géré par la Fédération Nationale Solidarité Femmes et soutenu par le Secrétariat d’État chargé de l’égalité entre les femmes et les hommes, s’appuie sur de forts liens partenariaux avec les principales associations nationales agissant pour l’égalité femmes/hommes, pour les droits des femmes et luttant contre les violences sexistes et sexuelles qui leur sont faites.

Le 3919 assure dès lors un premier accueil pour toutes les femmes victimes de violences sexistes. Lorsque c’est nécessaire, les chargées de cet accueil orientent vers les associations nationales ou locales partenaires, les mieux à même d’apporter la réponse la plus adaptée.

 

Le 3919 et la Fédération Nationale Solidarité Femmes

Une femme sur 10 est victime de violences conjugales (enquête ENVEFF, 2001) et une femme décède tous les 3 jours sous les coups de son compagnon (étude de la Délégation aux Victimes – Ministère de l’Intérieur, 2013). Telles sont les informations qui ont fait prendre conscience à l’opinion publique que la violence conjugale est un fléau social, un problème de société que les pouvoirs publics doivent prendre en compte.

Dès 1992, la Fédération Nationale Solidarité Femmes créait le service téléphonique national d’écoute « Violence Conjugale – Femmes Info Service » devenu le 3919 -Violences Conjugales Info en 2007. En 2014, les missions du 3919 sont donc étendues à la réponse à toutes les formes de violences faites aux femmes.

Une équipe d’écoutantes professionnelles assure une écoute bienveillante qui permet à la personne qui appelle de parler de la situation vécue dans un climat de confiance. L’objectif de cette écoute est de permettre à la personne d’agir, grâce aux informations apportées sur les démarches à suivre. Le but est, dans la mesure du possible, d’orienter la femme victime vers une association spécialisée qui pourra l’accompagner dans le parcours de sortie des violences qu’elle subit.

En cas de danger immédiat, appelez la police, la gendarmerie ou les pompiers en composant le 17 ou le 18.

Témoignages : « J’ai été sauvé de la violence conjugale par un élan de solidarité sur internet »

Victime d’une tentative de meurtre par son conjoint, abandonnée par la justice, Laura a lancé un SOS sur Twitter pour mobiliser l’opinion publique.

Laura Rapp, 33 ans, a refusé la fatalité de mourir sous les coups de son ex-conjoint. Sans protection aucune face à lui, elle a livré bataille pour sauver sa vie et celle de sa fille Alice, avec tous les moyens à sa disposition. Notamment en mobilisant l’opinion publique grâce aux réseaux sociaux et aux médias. Aujourd’hui, elle vient de publier un livre Tweeter ou mourir, (éd. Michalon), où elle raconte son combat personnel et son engagement pour les femmes victimes de violences conjugales et leurs enfants.

« Je n’arrivais pas à admettre qu’il s’agissait de violences conjugales »

A la première gifle que m’a donnée mon conjoint, j’aurais dû partir, c’est certain. Cela semble si simple vu de l’extérieur ! Mais la réalité d’une relation amoureuse toxique est hélas tellement plus complexe… Au fil des mois, je me suis retrouvée prise au piège de son emprise, de son contrôle et de ses menaces. Muselée par la honte et la culpabilité d’accepter l’inacceptable, les insultes, les humiliations, les coups. Je tentais de me persuader que je vivais un amour conflictuel et passionnel, je n’arrivais pas à admettre qu’il s’agissait de violences conjugales. Jusqu’à cette soirée d’avril 2018 où il a tenté de m’étrangler devant notre petite fille de 2 ans. Si des voisins n’étaient pas intervenus, je serais morte. Il a fallu ce drame pour que je décide de porter plainte contre mon bourreau et de m’en remettre à la justice.

« Je me suis soumise à toutes les étapes de la procédure »

Mon conjoint a rapidement été incarcéré et mis en examen pour tentative de meurtre. De mon côté, je me suis soumise à toutes les étapes de la procédure. Dépôt de plainte au commissariat, confrontation avec mon agresseur, examen à l’Unité médico-judiciaire, audition de plusieurs heures avec la juge d’instruction, expertise psychologique. Tout cela était extrêmement lourd et pas toujours d’une grande bienveillance. De manière plus ou moins explicite revenait souvent cette interrogation, tellement culpabilisante : mais pourquoi n’êtes-vous pas partie ? Aucun soutien psychologique ne nous a été proposé, ni à moi ni à ma petite fille qui cette nuit-là avons pourtant vu la mort de près. J’ai dû me débrouiller seule pour trouver un psychiatre pour moi et une pédopsychiatre pour ma fille pour prendre en charge notre traumatisme. Mais j’ai supporté en me disant que c’était le prix à payer pour être enfin libérée de cet homme et avoir droit à une vie normale.

« J’étais abandonnée, livrée à mon bourreau »

Le choc fut donc terrible quand, un an plus tard, mon ex-conjoint a été remis en liberté en attente du procès, sans bracelet électronique. Il était certes assigné à résidence en province, loin de la région parisienne où je vivais. Mais aucun moyen n’a été déployé pour s’assurer qu’il respectait ses obligations. Et il les a évidemment transgressées ! Jusqu’à venir m’attendre devant chez mes parents. Mon père l’a fait fuir, je suis allée déposer une main courante au commissariat et la juge d’instruction en charge du dossier a été alertée. Mais elle ne m’a jamais répondu et n’a pas ordonné la réincarcération de mon ex-conjoint. Il est donc resté en liberté, tandis que moi je vivais comme une bête traquée, m’attendant à chaque instant à ce qu’il me tombe dessus pour tenter à nouveau de me tuer. En état de terreur perpétuelle, j’ai essayée d’obtenir un « téléphone grave danger » mais ma demande est restée sans suite. J’avais été abandonnée, livrée à mon bourreau.

« Il ne me restait que les réseaux sociaux »

A ce moment-là, j’ai compris une chose : si tant de femmes meurent chaque année sous les coups de leur conjoint, cela n’est en rien une fatalité mais trop souvent le résultat d’un système qui dysfonctionne. Les victimes de violences conjugales sont incitées à porter plainte et aller en justice. Mais rien n’est fait pour les soutenir dans ce long et éprouvant parcours ni pour les protéger. Alors j’ai décidé de chercher ailleurs une protection susceptible de me sauver la vie : sur les réseaux sociaux. J’ai bien conscience que ce n’est pas le lieu où la justice doit se rendre. Mais comment faire quand elle ne se rend nulle part ? Après mûre réflexion, le mardi 14 mai 2019, j’ai posté un message sur Twitter, intitulé « A l’aide ». J’y ai exposé ma situation, le danger de mort que je courais et mon désespoir après avoir épuisé sans succès tous les recours officiels.

« Une immense chaine de solidarité s’est formée »

Allait-on me traiter de fabulatrice, m’insulter, lâcher sur moi des torrents de haine comme cela arrive souvent sur les réseaux sociaux ? Cela été tout l’inverse ! En l’espace de quelques heures, j’ai reçu une multitude de messages bienveillants, provenant de femmes mais aussi d’hommes. Mon tweet a été très largement partagé. Une immense chaîne de solidarité s’est formée pour interpeller les pouvoirs publics sur mon sort. J’étais tellement soulagée que quelqu’un m’entende enfin ! Cette vague d’indignation est parvenue aux oreilles de journalistes, ils ont fait des articles et demandé des explications insistantes au Parquet. Face à la pression, la justice a ordonné la réincarcération de mon ex-conjoint. Et tout cela en une semaine, alors que j’alertais et suppliais en vain depuis trois mois. Twitter m’a sauvée la vie et celle de ma fille !

« La médiatisation m’a permis de continuer à me sentir vivante »

Ce tweet a donné de la visibilité aux femmes victimes de violences conjugales qui, une fois qu’elles ont enfin réussi à trouver le courage de porter plainte, subisse l’abandon par le système judiciaire. C’est leurs voix à toutes que j’ai voulu porter lorsque j’ai été invitée au Grenelle sur les violences conjugales organisé par le gouvernement en septembre 2019. J’ai notamment été consultée pour améliorer les procédures d’obtention du « téléphone grand danger » et du « bracelet anti-rapprochement ». Alors que j’attendais le procès aux Assises de mon ex-conjoint, cette médiatisation autour de moi m’a permis de continuer à me sentir vivante, me donnait l’impression d’une bulle protectrice. Même si bien sûr, il y avait aussi le revers de la médaille. Car la médiatisation ne fonctionne pas à sens unique, elle réclame son dû, se repait de votre vie privée étalée aux yeux de tous, suscite des jalousies chez certains et provoque des attentes énormes chez d’autres victimes.

« Ma fille et moi avons pris souffrance à perpétuité »

Le procès a été d’une violence inouïe, j’y ai été traitée comme une criminelle, humiliée par les avocats de la défense. Mais à la fin, mon conjoint a été condamné à 8 ans de réclusion criminelle et 5 ans de suivi socio-judiciaire. Il encourait la perpétuité, il ne s’en est pas si mal sorti… Mais le juge a refusé de le déchoir de ses droits parentaux : il a considéré que sa tentative de meurtre contre moi sous les yeux de notre fille terrifiée n’entachait en rien ses aptitudes à être un bon père ! Peu importe que les pédopsychiatres aient diagnostiqué un sévère syndrome de stress post-traumatique chez Alice : elle devrait continuer à côtoyer son père, au nom du lien biologique sacralisé par la justice de notre pays . Malgré mon épuisement et les énormes difficultés économiques dans lesquelles m’ont plongée ces années de procédures judiciaires, j’ai fait appel et nous avons gagné : mon ex conjoint a été déchu de ses droits parentaux. Cette décision fera jurisprudence et elle constitue un immense espoir pour tous les enfants trop souvent « victimes fantômes » des violences conjugales. Aux dernières nouvelles, mon bourreau a demandé un aménagement de peine, alors même qu’il n’a pas encore effectué la moitié de sa condamnation. Ma fille et moi avons pris souffrance à perpétuité… « .

Fait d’actualité: Le long calvaire d’une femme victime de violences conjugales Une femme, vulnérable car placée sous curatelle, subissait des violences de son compagnon depuis des mois. Interpellé, il a accusé un mystérieux ancien compagnon d’être à l’origine des marques de coups. Le tribunal n’y a pas cru et a envoyé ce quinquagénaire derrière les barreaux.

Ce sont les deux nièces de la victime qui sont intervenues, le 10 octobre dernier. Elles avaient découvert leur tante blessée au visage, avec un coquard à l’œil, ainsi que des gros hématomes sur tout le corps. Elle avait, selon son témoignage, était mise au sol et frappée par son compagnon.

La victime avait été mise en sécurité dans un hôtel, puis avait été conduite à l’hôpital de Saint-Julien-en-Genevois, où l’homme avait été la chercher avant d’être interpellé à son retour.

Il l’enfermait, selon lui, « pour la protéger »

La compagne s’était vue prescrire quatorze jours d’ITT et avait raconté que son calvaire durait depuis des mois avec ce compagnon alcoolique, elle-même reconnaissant qu’elle s’adonnait aussi à la boisson.

Les nièces ne se doutaient de rien, le compagnon leur paraissant très gentil. Il leur assurait que leur tante chutait toute seule. La curatrice s’était aussi inquiétée de voir des bleus sur ses bras, mais la victime minimisait les faits et ne voulait pas porter plainte.

Jugé par le tribunal correctionnel de Bourg-en-Bresse, cet homme de 51 ans s’est défendu de toute violence : « C’est une fille formidable. Mais elle tombe toute seule, c’est le mélange entre médicaments et alcool. Et après, je la ramasse par terre. » Il a même expliqué qu’un mystérieux ancien concubin, dont il est le seul à parler, la frappait dans la rue, et qu’il l’avait donc « enfermée pour la protéger ». Jurant même face à ses juges : « Je suis d’accord à 200 % que quelqu’un l’a frappée, mais ce n’est pas moi ».

« Elle a vécu six mois d’enfer avec lui »

« Les bras m’en tombent, il se présente comme une victime », s’est agacée Me Marie Audineau. « Cette femme a été défigurée après avoir vécu six mois d’enfer avec lui. Il l’isolait de sa famille et elle était sous son emprise », constatait l’avocate de la victime.

« Cette femme n’arrivait pas à porter plainte, par peur de se retrouver à la rue. Et je trouve le déni de ce monsieur très inquiétant » estimait la procureure. Elle a requis trois ans de prison dont un avec sursis probatoire, et maintien en détention », contre Philippe Dubar.

« Il a pu garder les clés pour la protéger, qu’elle ne sorte pas la nuit pour se mettre en danger. Mais elle n’était pas séquestrée. Elle avait d’ailleurs son téléphone » relevait Me Juliette Romanet. L’avocate du prévenu pensait que « quelque chose ne colle pas dans le discours de la victime, qui souffre de bipolarité et était toujours ivre quand elle l’accusait ». Elle estimait qu’il y avait « des éléments qui permettent de douter ».

Le tribunal a suivi les réquisitions.

Focus: Porter plainte pour violences conjugales

Les violences au sein d’un couple font partie des plus délicates du fait de la proximité et de l’attachement entre l’auteur et la victime qui se retrouve confrontée à des sentiments ambivalents. Pourtant, il est important d’agir vite en déposant une plainte avant que la situation ne se répète. Comment s’y prendre dans une telle situation ? À qui s’adresser ? Explications.

Porter plainte pour violences conjugales

-Qu’est-ce qu’un dépôt de plainte ?

Le dépôt de plainte permet à une victime de dénoncer l’auteur de son agression afin de demander à la justice sa condamnation pénale (amende, prison).

-Qui peut porter plainte pour violences conjugales ?

Vous pouvez porter plainte pour violence conjugale à partir du moment où vous en êtes victime et êtes en couple, c’est-à-dire uni par un mariage, un PACS ou en concubinage.

-Comment porter plainte pour violences au sein du couple ?

Pour que la plaine pour violence conjugale soit recevable, vous devez la déposer dans les 6 années qui suivent les faits. Pour cela, différents procédés sont à votre disposition.

Vous pouvez d’abord vous présenter dans un commissariat de police ou une brigade de gendarmerie. Vous n’êtes pas tenu par une sectorisation particulière néanmoins, il est préférable de s’orienter vers le service de proximité qui sera plus à même d’intervenir rapidement en cas d’urgence. Une messagerie instantanée vous permet désormais d’échanger avec un agent de police et de signaler un acte de violence au sein du ménage.

Ensuite, il est aussi possible de déposer plainte auprès du procureur de la République par papier libre en indiquant l’état civil du plaignant, le nom de l’auteur de l’infraction, le récit des faits, le lieu et la date de l’infraction, les coordonnées des éventuels témoins, une estimation du préjudice et tout document servant de preuve (certificat médical, arrêt de travail, etc.).

Enfin, vous pouvez exceptionnellement adresser votre déclaration au juge d’instruction en vous portant partie civile.

Bon à savoir : Il existe de nombreux services en capacité de vous proposer assistance en cas de violence. N’hésitez pas à contacter le 3919 (Violences Femmes Info, accessible 24h sur 24 et 7 jours sur 7), une association France Victimes via le numéro 116 006 ou à consulter le site parcours-victimes.fr.